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était venu d’irriter encore les convoitises et les espérances de Naude-Rajah, en faisant miroiter devant ses yeux la perspective de l’acquisition de Trichinapaly. Elle lui écrivit alors directement ; sa lettre était habile et bien faite pour séduire le roi, dont elle caressait les prétentions. L’intelligente femme déclarait que si quelqu’un avait le droit d’occuper Trichinapaly, c’était le maître du Maïssour ; que les Français verraient avec joie cette ville entrer dans le domaine d’un prince pour lequel ils professaient de l’estime, et qu’ils étaient tout prêts à solliciter de leur auguste allié le soubab du Dékan (qui, au nom du Mogol, donnait l’investiture des royaumes) le paravana de cession d’une forteresse et d’un territoire détenus au mépris de toute justice par Méhémet-Ali-Kan et ses alliés.

La lecture de cette lettre exerça une vive impression sur l’esprit de Naude-Rajah. Il sentait toute la portée des offres qu’on lui faisait ; mais le souvenir de la capitulation de Law était récent. Il était bien tenté pourtant, mais craignait de se décider trop vite et de perdre, par une fausse manœuvre, le moyen d’acquérir Trichinapaly. Il hésitait à rompre ouvertement avec ses alliés, dont l’armée entourait presque la sienne, mais ne voulait pas ruiner toute possibilité d’entente avec Dupleix et le soubab. Il prit alors le parti de louvoyer et s’efforça de traîner la négociation en longueur, tout en se montrant favorable au projet d’une alliance offensive et défensive avec Salabet-Singue.

Morari-Rao, aiguillonné par les émissaires du diplomate en jupon, l’imagination montée par le souvenir de Chanda-Saïb et par l’espoir de lui succéder sur le trône