Page:Hamont - Dupleix d’après sa correspondance inédite, 1881.djvu/177

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’heure. Nous n’avions pas à délibérer sur le parti à prendre. » On répondit qu’ayant entrepris le voyage avec Mousafer-Singue, et le prince défunt ayant un fils, il n’était pas naturel d’abandonner tout d’un coup les intérêts de ce dernier, qu’enfin il fallait que Dupleix fût informé de la révolution qui venait de s’accomplir, que lui seul pouvait décider de la fortune des quatre prétendants, que pour tout sauvegarder, la France se chargerait de leur garde.

Tout le monde applaudit. Salabet-Singue, l’aîné des trois frères, dit à Bussy : « Dupleix regardait Mousafer-Singue comme son frère ; le nabab était mon oncle. Je suis donc le neveu de Dupleix. S’il cessait d’être généreux, je voudrais moi-même renoncer aux droits que ma naissance me donne à l’héritage de mon frère. Dupleix saura que nous n’avons trempé en rien dans la mort de son frère Mousafer-Singue. Il autorisera les marques d’amitié que vous pouvez me donner. S’il vous rappelle, mes frères et moi nous vous suivrons. Nous ne voulons tenir notre pouvoir que de lui et des Français. »

Ce discours, inspiré évidemment à Salabet-Singue par un groupe de politiques qui déjà gouvernaient le prince, frappa Bussy, dont les appréhensions se dissipèrent. Il résolut d’accentuer encore l’attitude de protecteur et d’arbitre qu’il avait prise au début.

Il fit placer les trois frères au milieu de son état-major, et s’achemina avec eux vers le quartier royal, au milieu d’une foule d’Hindous qui accablaient le général de leurs bénédictions, tout en laissant voir leur haine pour la famille de Mousafer-Singue, dont ils n’avaient