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les armes et la turbulence de ses ancêtres masculins. Ils invitèrent Kerjean à aller se divertir avec eux dans la ville, qui faisait partie du fief de l’un d’eux ; ils y avaient rassemblé des danseuses et chanteuses du pays. Kerjean refusa, sans se douter que cette fête était le prélude d’une tragédie.

On prévint tout à coup le soubab que des soldats des généraux suspects, campés à deux lieues du contingent français, pillaient les bagages de la couronne et avaient arrêté un chariot chargé de fusils, destinés à Bussy. Dans la rixe, presque toute l’escorte avait été tuée, ainsi que plusieurs cipayes. Mousafer-Singue envoya aux nababs pour leur demander des explications. Ils répondirent que leur responsabilité n’était pas en jeu ; que l’arrière-garde de l’armée avait ravagé le pays, et que le pillage dont on se plaignait n’était qu’une représaille de victimes exaspérées, qu’eux-mêmes ne pouvaient permettre qu’on saccageât leurs domaines, mais qu’on avait outre-passé leurs ordres, et qu’ils donneraient des satisfactions.

Mousafer-Singue, excité par son entourage, crut à un défi des nababs. On criait à ses oreilles que c’était le manque d’énergie qui avait perdu Naser-Singue, et qu’à de telles insolences il fallait un châtiment exemplaire. Il dépêcha Kroumikan, l’interprète français, pour intimer aux nababs l’ordre de venir se jeter à ses pieds. Le messager ne revint pas. On l’avait forcé par dérision à prendre part à l’orgie. Le prince, impatient, envoya d’autres députés ; on les chassa, avec des huées et des coups. À la nouvelle de cet affront, Mousafer-Singue eut un accès de fureur. Il appelle ses esclaves, se fait ar-