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homme d’État doublé d’un artiste. Il fit élever sur la place de Pondichéry une tente immense où le faste oriental s’alliait aux pompes de l’Occident. Deux trônes semblables étaient dressés en face l’un de l’autre dans cette vaste salle, dont les draperies formaient comme un ruissellement de cachemire, de soie, de broderie, d’or et de pierreries.

Dupleix s’y rendit au milieu d’un cortège royal. Un escadron de gardes à cheval le précédait, ainsi que douze lanciers et vingt-quatre pions portant chacun un pavillon doré, fond blanc. Derrière Dupleix et son état-major, venaient deux éléphants de taille gigantesque : l’un portait, arboré sur son dos, le drapeau français, immense étendard dont les plis se déroulaient librement au souffle de l’air ; l’autre, le Mamurat sur un pavillon fond blanc et or, insigne dont les vice-rois de l’empire mongol seuls ont le droit de se faire précéder, et que Mousafer-Singue venait de donner au gouverneur. Douze éléphants suivaient, chargés de timbaliers, de drapeaux, de gens de guerre, de trompettes et de fifres. Des bataillons de cipayes, au pittoresque costume, arrivaient alors, puis des batteries d’artillerie. Des compagnies d’infanterie, des escadrons de cavalerie européenne fermaient la marche. Dans les rues, les bataillons vainqueurs à Ambour et à Gingi formaient la haie. Le canon des remparts et de la citadelle tirait des salves répétées.

Mousafer-Singue entra le premier dans la tente et prit place sur un des trônes, ayant à ses côtés toute la noblesse du Dékan. Tout à coup les détonations de l’artillerie devinrent si formidables qu’on vit trembler