français, qui gardait à l’arrière-garde une fière contenance.
Cette campagne si hardiment commencée finissait donc par le revers le plus cuisant et le plus imprévu. Dupleix en ressentit l’amertume ; pendant quelques heures, sa colère, son indignation contre ses stupides alliés le dominèrent entièrement ; mais il n’était pas d’un tempérament à dissiper ses forces en récriminations inutiles quand le péril était proche, et jamais la situation n’avait été plus dangereuse.
Naser-Singue avait envahi le Carnate à la tête d’une armée de trois cent mille hommes. Il y entrait pour soutenir les droits du dernier Fils d’Anaverdikan, Méhémet-Ali, à qui il avait envoyé le paravana d’investiture de la nababie du Carnate. Ainsi chaque prétendant à la succession de Nizam el Molouck avait, à ses côtés, un candidat désigné pour le trône d’Arcate. Chose grave, Naser-Singue avait obtenu des Anglais un secours de huit cents soldats, commandés par un habile officier, le major Lawrence. Français et Anglais allaient donc se heurter sur les champs de bataille, alors que leurs deux pays étaient en paix. « La façon d’agir de ces gens-là, qui préfèrent à l’alliance du plus grand monarque celle d’un gueux de nègre, est inouï, disait Dupleix. Mais aussi comment résister à l’appât d’une somme de cent mille roupies, avec quoi Lawrence a jugé à propos de se boucher les yeux, tant sur l’intérêt de sa nation que sur l’atteinte formelle que des sujets aussi peu autorisés ont la hardiesse de donner aux alliances les plus solennelles ? Floyer a eu la bonne part. Lawrence s’est fait tirer l’oreille parce que la somme offerte n’était pas