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Saïb était brave, audacieux, actif, avec des capacités militaires, parfois du coup d’œil, de la décision, un certain sens politique, un esprit fécond en ressources, de la suite dans les idées, une volonté, de la grâce et des séductions de paroles, avec cela une fidélité à ses serments plus grande que celle de ses compatriotes, et une ambition sans égale. Il aimait les Français et professait un enthousiasme sans égal « pour le grand nabab de Pondichéry », avec qui il entretenait une correspondance suivie, dont madame Dupleix était l’inspiratrice.

Chanda-Saïb proposa tout de suite à Mousafer-Singue une ligue offensive et défensive ; il lui montra les Mahrattes qui l’appuyaient, il lui parla de Dupleix ; il rappela les exploits des Français à Madras, à Saint-Thomé, à Pondichéry. Il vanta la supériorité des troupes européennes. Il déclara enfin à Mousafer-Singue qu’il se faisait fort d’obtenir l’alliance de Dupleix et le secours de ses soldats, dont les rangs de fer briseraient toutes les armées indiennes. Le prétendant à la succession de Nizam el Molouck fut vite convaincu. Il signa, enthousiasmé, un traité qui donnait le Carnate à Chanda-Saïb et obligeait ce dernier à obtenir l’appui des Français. Les deux nababs écrivirent aussitôt au Grand Mogol pour solliciter un paravana qui déclarerait Naser-Singue rebelle. La cour de Delhi se montra favorable à ces instances et reconnut Mousafer-Singue comme soubab du Dékan. Les deux confédérés, forts de ce consentement et de la protection du favori, Mouzouvalikan, qui gouvernait alors l’empire, adressèrent à Dupleix une pompeuse dépêche pour instruire celui-ci de tout ce qui venait de se passer