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l’ennemi remuer, en face du bastion Saint-Joseph, des masses de terre de plus en plus volumineuses, craignant de voir démasquer toute une artillerie qui aurait raison des pièces de position du rempart, Dupleix fit élever une série de batteries établies sur les deux courtines et sur les glacis en face ; on en construisit une autre à cent soixante toises de la porte de Madras, destinée à prendre la tranchée en écharpe. Et toujours préoccupé de garder la supériorité de feu sur l’ennemi, il arma de canons deux nouveaux ouvrages. Il avait rassemblé ainsi une trentaine de pièces dont l’ennemi ne soupçonnait pas l’existence. Dès les premières salves, dans ce duel d’artillerie, il fut évident que la place aurait l’avantage. Cela ne suffisait pas encore. Il ne fallait point laisser de repos à l’Anglais. La nuit, on faisait sortir des pièces de campagne qui canonnaient le camp sans relâche. Déplacées sans cesse, elles ne souffraient point. Et puis c’étaient des attaques sur les convois qui portaient les munitions de la flotte à l’armée. Madame Dupleix, âme de héros dans un corps de femme, secondait admirablement son mari ; elle était son ministre des relations extérieures et le plus fin diplomate du monde. Possédant parfaitement la langue du pays, exerçant sur les Hindous un extraordinaire prestige, avec des largesses et son air de reine, elle tenait à sa dévotion une foule de cipayes anglais ; elle en avait fait ses espions ; elle était sûre de leur fidélité. Elle savait tout ce qui se passait dans l’armée de Boscawen, qui se voyait enlever, une nuit, dans le court trajet de la mer à son bivouac, deux canons de 24, débarqués par ses vaisseaux.