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Bien entendu il ne faut pas restreindre arbitrairement le sens de ce mot. La représentation est quelque chose d’aussi général que la pensée de Descartes. C’est encore l’expérience si l’on veut : mais c’est l’expérience dans l’acception la plus large, c’est-à-dire le caractère commun des modes quelconques de la connaissance en tant qu’elle se témoigne à elle-même. Il faut se garder d’imiter certains philosophes, Vacherot par exemple, qui entendent par représentation les représentations sensibles seulement et qui, par conséquent, attachent au mot une idée d’empirisme.

Cette explication donnée, essayons d’analyser la notion de représentation. La représentation se décompose en un représentatif et un représenté ou si l’on aime mieux en un sujet et un objet. Mais ces derniers mots que la première édition des Essais avait proscrits doivent être pris, comme l’ont fait encore Descartes et Spinoza, dans le sens scolastique : l’objet, ce qui existe objectivement, c’est ce qui n’est que dans la représentation ; un sujet, c’est quelque chose qui existe indépendamment de la représentation ou du moins indépendamment d’une certaine représentation. Quoi qu’il en soit, d’ailleurs, de cette question de terminologie, la dualité de la représentation est incontestable : il n’y a point de représentation sans représentatif et sans représenté et de leur côté ces deux termes sont corrélatifs : un représentatif veut en face de lui un représenté et réciproquement.

Il s’agit maintenant de bien comprendre le rapport qui subsiste entre la représentation et les deux éléments corrélatifs que nous venons de distinguer en elle. Occupons-nous d’abord du rapport de la représentation avec le représentatif. La représentation, dira-t-on, suppose un représentatif ou, selon le langage habituel depuis Kant, un sujet : ce sujet est donc antérieur à la représentation et son fondement, c’est un moi réel. Les représentations ne sont que par lui et en lui. Autrement dit, les représentations ne sont que des représentations. Par conséquent le système qu’on appelle idéalisme subjectif ou égoïsme métaphysique est le vrai. — Bien loin d’être exact, ce langage dénature l’ordre réel des notions. Non, je ne suis pas antérieur à la représentation et plus fondamentalement réel : comme moi empirique