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d’Aristote qui ait la forme d’une conversation, c’est-à-dire un dialogue ? Cette opinion, déjà indiquée, en partie du moins, par Philopon, est celle d’Ueberweg. Mais en fait, nous allons le voir, Aristote ne renvoie pas à des discussions orales. Reste donc qu’il ait renvoyé à un dialogue. À l’appui de cette manière de voir on pourrait faire valoir que l’expression ἐν κοινῷ γιγνομένοις λόγοις peut recevoir, comme le veut Ch. Thurot, le sens de ἐν ταῖς διαλεκτικᾶς συνόδοις (Top. VIII, 5, 155 a, 32), et que l’expression εὐθύνας δεδωκυῖα s’appliquerait très convenablement à un examen contradictoire dans lequel la doctrine attaquée aurait été d’autre part défendue. Mais c’est une question de savoir si les mots en question, qui peuvent recevoir cette interprétation, n’en admettent pas d’autre. En fait il n’est pas douteux, puisque les commentateurs nous produisent les textes, qu’Aristote renvoie à l’Eudème. Seulement, si cet écrit est un dialogue, c’est aussi un ouvrage publié et il reste douteux qu’Aristote ait voulu le désigner en tant que dialogue, plutôt que comme ouvrage publié. C’est même cette dernière désignation qui semble le plus probable ; car le participe présent γιγνομένοις ne pourrait s’appliquer à une conversation qui, fixée une fois pour toutes au moyen de l’écriture, est entrée dans le domaine du passé ; il ne s’appliquerait bien qu’à des conversations de chaque jour, sans cesse recommencées et par conséquent toujours actuelles. Or nous avons vu que les faits excluaient une référence à de telles conversations. S’appliquant à l’Eudème, puisque tel est le fait, le participe présent signifie donc, et c’est un sens très naturel : les discours qui, consignés dans l’Eudème, sont tombés et se trouvent présentement, par la publication de l’ouvrage, dans le domaine public. Le texte du Traité de l’âme est donc en somme d’accord avec celui de la Poétique pour répartir les écrits d’Aristote en écrits publiés et écrits non publiés. — Deux autres textes paraissent d’ailleurs confirmer les deux précédents. Dans l’Éthique à Nicomaque, Aristote renvoie à des ἐγκύκλια (I, 3, 1096 a, 2) et, dans le De caelo, à des ἐγκύκλια φιλοσοφήματα (I, 9, 279 a, 30), qui sont, eux aussi, des ouvrages publiés. Non seulement c’est