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crète plus simple, dans laquelle ils puissent se résoudre et dont ils proviendraient tous (ibid., II, 5, 332 a, 26). Ils ne peuvent que se transformer les uns dans les autres : ce qui est rendu possible par le fait que chaque élément a au moins une qualité opposée à l’une des qualités de chaque autre élément (ibid., II, 4, 331 a, 13) et parce que les qualités se divisent en actives, le chaud et le froid, et passives, le sec et l’humide (Météor., IV, 1 déb.). De cette façon la destruction d’un élément est, du même coup, la naissance d’un autre et réciproquement, la matière se conservant sous le passage des formes (De gen. et corr., I, 3)[1].

Les éléments ne tombent jamais à l’état de pureté sous l’observation (ibid., II, 3, 330 b, 21) et, dans tous les cas, ces éléments ne sont pas les seuls corps du monde terrestre : au-dessus d’eux sont les mixtes. Aristote, dans sa théorie de la mixtion (De gen. et corr., I, 10), montre la même tendance hiérarchique qui lui fait affirmer en thèse générale que la forme est autre que ses conditions, la forme de la syllabe par exemple, autre que les lettres (Métaph. Η, 3, 1043 b, 5-14), et la même préoccupation de la qualité qui inspire sa théorie de l’altération. La mixtion n’est pas un mélange mécanique où subsisteraient dans leur nature première les éléments juxtaposés, comme si on avait mêlé de l’orge et du blé. Les éléments mêlés ne subsistent qu’en puissance ; leurs formes s’altèrent réciproquement et une forme nouvelle prend naissance. En un mot la mixtion, pour Aristote, est ce que nous appelons une combinaison chimique, à condition toutefois qu’on ne limite pas cette notion de combinaison par des réserves d’atomiste.

Les éléments et les mixtes sont, au point de vue de la substance, comme les deux moments du monde inanimé selon Aristote. Nous ne pouvons songer à poursuivre dans le détail l’explication des divers mixtes reconnus par Aristote, pas plus que, nous plaçant au point de vue des mouvements et non plus de la substance, nous ne pouvons lui demander comment procèdent, selon lui, dans leurs spéci-

  1. Surtout 318 a, 23 : … τὴν τοῦδε φθορὰν ἄλλου εἶναι γένεσιν καὶ τὴν τοῦδε γένεσιν ἄλλου εἶναι φθορὰν…