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en date des conceptions définies de l’espace, la conception de Platon dans le Timée (209 b, 5-17). Il est donc difficile de connaître la nature de l’espace (209 b, 17-20), et même les difficultés de se faire de l’espace une conception quelconque sont telles qu’on pourrait aller jusqu’à douter de l’existence de l’espace (1 fin).

Quelque embarras que puissent causer les difficultés ainsi rassemblées, leur exposition, et aussi l’ordre dans lequel elles sont rangées, préparent une solution. Cette solution, qui sera fournie par une bonne définition de l’espace, Aristote achève de s’en rapprocher en considérant une dernière fois, et de plus près, les deux tentatives opposées pour définir l’espace, ou par la forme, ou par la matière, et en cherchant dans une distinction des divers sens de l’expression « être dans quelque chose » un moyen de mieux préciser l’idée du rapport spatial de contenu à contenant et d’écarter la difficulté proposée par Zénon. — Les difficultés sur la nature de l’espace qu’Aristote a eu soin de ranger à la suite et au-dessus de toutes les autres sont celles que soulève l’application à cette essence des idées de matière et de forme. Et en effet, tout en nous laissant encore loin du but, il est incontestable que la tentative d’employer ces deux notions à définir l’espace nous prépare à comprendre ce qu’il est effectivement. L’espace ne peut pas être la matière des choses, parce qu’il les enveloppe et les limite, tandis que la matière est l’indéfini qui est entre les limites (2, 209 b, 31). Mais il y a une raison commune qui empêche l’espace d’être forme comme d’être matière, c’est qu’une forme et une matière sont l’une et l’autre inséparables de la substance dont elles sont éléments. Au contraire, en vertu du fait capital de l’ἀντιμετάστασις, l’espace, au lieu d’être une partie ou une habitude des corps, est séparé des corps (χωριστὸς ὁ τόπος ἑκάστου) (ibid. 209 b, 17-20). — Si maintenant nous essayons de nous rendre compte avec quelque exactitude de ce qu’il faut entendre par « être dans quelque chose », nous allons voir se préciser notre conclusion que l’espace n’est ni la matière, ni la forme, et qu’il est distinct de ce qu’il renferme. L’expression « être dans » a évidemment beaucoup de sens : par exem-