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demander s’il n’est pas le premier et le plus fondamental des êtres (ibid. 208 b, 29-209 a, 2).

Mais il faut voir quelles difficultés on rencontre quand on entreprend d’assigner sa nature. Comme il a, ou paraît avoir, les trois dimensions, cette propriété, qu’il partage avec les corps, fait qu’on est tenté tout d’abord de voir en lui un corps, bien que, comme nous l’avons dit, il se distingue des corps. Cependant, s’il est un corps, il y aura, ou il pourra y avoir, deux corps à la fois dans le même lieu (ibid. 209 a, 2-7). D’ailleurs il faut un lieu pour les surfaces et les autres limites, aussi bien que pour les corps ; l’espace, puisqu’il est ainsi requis par des choses abstraites, ne serait donc pas une chose concrète, et, par conséquent, ne serait pas un corps. Néanmoins l’espace a une grandeur réelle et non pas seulement idéale. Or avec des êtres de raison on ne fait aucune grandeur réelle (ἐκ δὲ τῶν νοητῶν οὐδὲν γίνεται μέγεθος) (ibid. 209 a, 8-18). Admettons que l’espace soit le contenant des corps : deux difficultés vont se présenter. D’abord il faudra se demander avec Zénon dans quoi est l’espace, si tout être est dans l’espace (209 a, 23-26). En second lieu, si l’espace est un être, que faut-il penser de l’espace qui sert de lieu aux êtres en voie d’accroissement ? Comme le lieu d’un corps doit être de même étendue que ce corps, l’espace va donc avoir sa croissance, comme l’être en voie d’accroissement qu’il renferme (209 a, 26-29) ? — Il convient évidemment de distinguer deux sortes de lieux : le lieu qui est commun à plusieurs corps, comme quand on dit que la terre est dans le ciel ; parce qu’elle est dans l’air, qui est lui-même dans le ciel (τόπος κοινός), et le lieu propre (τόπος ἴδιος), celui où chaque chose est immédiatement contenue (2, déb.). Mais, cette distinction faite, le lieu qui mérite vraiment son nom, le lieu propre, va apparaître connue embrassant et limitant le corps qu’il contient, c’est-à-dire comme la forme de ce corps (2, 209 b, 1-5). Or, d’autre part, en tant qu’il paraît posséder les dimensions de l’étendue (διάστημα τοῦ μεγέθους), c’est-à-dire en tant qu’il paraît s’étendre entre les limites, l’espace se présente comme étant la matière des choses, et telle est précisément la première