Page:Hamelin - Le Système d’Aristote.djvu/19

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

leurs des textes positifs pour établir qu’Aristote, à une époque postérieure au troisième et dernier voyage de Platon en Sicile, était resté fidèlement attaché à son maître. 1o  Olympiodore nous a conservé un fragment d’une Élégie d’Aristote sur Eudème[1], dans laquelle il s’exprime avec la plus grande admiration sur le compte d’un maître qui ne semble pas pouvoir être Socrate, mais seulement Platon. 2o  Aristote a édité certaines leçons de Platon qui, en raison de leur caractère, semblent être postérieures au dernier voyage de Sicile : elles portaient en effet sur l’Un et le Grand et Petit, sur les Nombres idéaux, bref sur des doctrines qui sont étrangères aux dialogues et que l’on connaît pour appartenir à la dernière période de la vie de Platon[2]. 3o  Denys dit expressément qu’Aristote, du vivant de Platon, ne fonda point d’école[3], et, s’il n’en avait été réellement ainsi, l’assertion d’Apollodore, qu’Aris-

    comme le montre Zeller (13, 1), peut s’appliquer à d’autres écoles qu’à celle d’Aristote. Du reste, puisque d’après Aristoxène le fait en question se serait produit ἐν τῇ πλάνῃ καὶ τῇ ἀποδημίᾳ, c’est-à-dire pendant un des deux derniers voyages de Platon en Sicile, qui seuls sont postérieurs à la fondation de l’Académie, Aristote n’aurait eu que vingt-quatre ans au moment du troisième, en 361/360 (cf. 11, 4). Il est plus vraisemblable que le témoignage d’Aristoxène vise Héraclide du Pont (cf. Zeller, II 1³, 424, 4 ; 989, 3).

  1. Fr. 623, p. 1583 a ; cf. Zeller, 12, 1. — L’Eudème dont il s’agit ne paraît pas être Eudème de Rhodes, mais plutôt ce condisciple d’Aristote dans l’école de Platon, qui mourut en 352 et en souvenir de qui Aristote composa son dialogue intitulé Eudème. Dès lors, c’est de cet Eudème, disciple de Platon, que parle Aristote, et non pas de lui-même, comme il arriverait si son élégie se rapportait à Eudème le Rhodien. C’est donc bien après le dernier voyage de Platon en Sicile qu’Aristote célèbre magnifiquement son maître. Au dernier vers, au lieu de οὐ νῦν, il faut lire μουνάξ (« nul ne peut jamais acquérir bien et bonheur à part l’un de l’autre »). Quant à « l’autel de l’amitié », c’est ici une figure de rhétorique. Sur tout ceci, cf. Zeller, loc. cit. Au reste l’élégie fût-elle adressée à l’Eudème, disciple d’Aristote, qu’il lesterait toujours dans la bouche d’Aristote un éloge enthousiaste de Platon : c’est ainsi que paraît avoir compris Olympiodore.
  2. Cf. Zeller, loc. cit., et II 1⁴, 416, 6 et 417, 1, 2 ; il s’agit des fameuses leçons sur le Bien.
  3. Ep. ad Amm. I, 7, p. 733 : συνῆν Πλάτωνι καὶ διέτριψεν ἕως ἐτῶν ἑπτὰ καὶ τριάκοντα, οὔτε σχολῆς ἡγούμενος οὔτ’ ἰδίαν πεποιηκὼς αἵρεσιν.