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non des discours, il est impossible qu’ils soient vrais ou faux (ibid. b, 3-12). Mais il y a plus : lorsque les contraires, lorsque l’habitude et la privation prennent dans des oppositions dérivées l’aspect de discours, ils ne participent pas pour cela au privilège des contradictoires. Nous avons déjà vu (p. 138) que l’un de ces deux opposés : « Socrate est bien portant », « Socrate est malade », ou de ces deux autres : « Socrate voit », « Socrate est aveugle » n’est pas nécessairement vrai, pendant que l’autre serait faux (ibid. b, 12-27).

Nous venons de parcourir les quatre sortes d’opposition et nous avons vu combien Aristote s’applique à les distinguer. Mais, s’il les distingue, il reconnaît aussi entre elles une parenté. Le lien de parenté n’est pas dégagé dans les deux chapitres des Catégories. Malgré cela, les quatre oppositions sont exposées dans un ordre assurément voulu et considéré comme rationnel. La contradiction ou l’opposition des relatifs n’est pas mise au milieu des deux autres, et celles-ci ne sont pas placées au commencement ou à la fin. On commence par l’opposition des relatifs, on passe à celle des contraires, de là à celle de l’habitude avec la privation, pour aboutir à celle des contradictoires. Dans le chap. 4 du livre Ι de la Métaphysique, cette classification hiérarchique, dont on aperçoit alors tout le sens, est remplacée par l’indication expresse d’une filiation. L’opposition la plus absolue est celle des contradictoires. Celle de l’habitude avec la privation est une limitation de la précédente. Limitée à son tour, l’opposition de l’habitude avec la privation devient l’opposition de contrariété. C’est donc au dernier rang qu’il faut placer l’opposition des relatifs, et, si telle est forcément sa place, c’est assurément, dans la pensée d’Aristote bien qu’il ne le dise pas, parce que cette opposition est celle qui contient le moins de négation[1]. Ainsi pour Aristote chaque sorte d’opposition n’est pas

  1. 1055 a, 38 ; b, 3 et 14 : εἰ δὴ ἀντίκειται μὲν ἀντίφασις καὶ στέρησις καὶ ἐναντιότης καὶ τὰ πρός τι, τούτων δὲ πρῶτον ἀντίφασις… ἡ δὲ στέρησις ἀντίφασίς τίς ἐστιν… δῆλον ὅτι ἡ μὲν ἐναντίωσις στέρησις ἂν τις εἴη πᾶσα, ἡ δὲ στέρησις ἴσως οὐ πᾶσα ἐναντιότης.