Page:Hamelin - Le Système d’Aristote.djvu/152

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

disant que les autres oppositions ont lieu entre des termes, sans liaison, ἄνευ συμπλοκῆς, tandis que la contradiction, l’ἀντίφρασις, est l’opposition de deux liaisons de termes, disons de deux propositions ou de deux jugements (ibid. b, 10). Voilà du moins ce que l’opposition de contradiction est primitivement. C’est seulement par dérivation qu’il y a opposition entre les termes ou choses, qui sont sous le discours affirmatif et le discours négatif, c’est-à-dire entre les concepts dans lesquels on peut substantifier l’affirmation et la négation : ainsi entre καθῆσται et μὴ καθῆσται, qui substantifient κάθηται et où οὐ κάθηται[1]. Toutefois Aristote se montre très prudent dans l’extension qu’il fait de l’opposition contradictoire des propositions aux termes. S’il passe sans hésitation des indicatifs aux infinitifs, il est très réservé quand il s’agit de passer aux substantifs. Il n’opposerait pas comme contradictoires ἄνθρωπος et οὐκ ἄνθρωπος : on sait qu’il appelle cette dernière expression un ὄνομα ἀόριστον, une expression indéfinie (Hermen. 2, 16 a, 30 ; cf. p. 163), tant il est loin d’y voir une négation précise de ἄνθρωπος. Il faut reconnaître cependant[2] qu’il étend à des termes substantifs la qualification d’opposés contradictoires ; car, dans la Physique par exemple (V, 3, 227 a, 7-10), il désigne sous le nom d’ἀντίφρασις l’opposition des points de départ et d’arrivée de la génération et de la corruption, qui sont l’être et le non-être. — Mais primitivement l’opposition contradictoire reste celle de deux jugements. Aussi a-t-elle pour caractère propre et privilégié de séparer le vrai du faux, l’un ou l’autre des deux opposés contradictoires étant vrai et l’autre faux (Cat. 10, 13 b, 33-35). Comme les relatifs, les contraires, les habitudes et les privations sont des termes et

  1. Cat. 10, 12 b, 6 : οὐκ ἔστι δὲ οὐδὲ τὸ ὑπὸ τὴν ἀπόφασιν καὶ κατάφασιν ἀπόφασις καὶ κατάφασις· ἡ μὲν γὰρ κατάφασις λόγος ἐστὶ καταφατικὸς καὶ ἡ ἀπόφασις λόγος ἀποφατικός, τῶν δὲ ὑπὸ τὴν κατάφασιν ἢ ἀπόφασιν οὐδέν ἐστι λόγος. λέγεται δὲ καὶ ταῦτα ἀντικεῖσθαι ἀλλήλοις ὡς κατάφασις καὶ ἀπόφασις· καὶ γὰρ ἐπὶ τούτων ὁ τρόπος τῆς ἀντιθέσεως ὁ αὐτός. ὡς γάρ ποτε ἡ κατάφασις πρὸς τὴν ἀπόφασιν ἀντίκειται, οἷον τὸ κάθηται τῷ οὐ κάθηται, οὕτω καὶ τὸ ὑφ’ ἑκάτερον πρᾶγμα ἀντίκειται, τὸ καθῆσθαι τῷ μὴ καθῆσθαι.
  2. Avec Zeller, p. 216, n. 2.