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seul élément commun nécessaire pour qu’il y ait contrariété consistant seulement en ce que les opposés doivent être des genres de l’être, et non pas des termes d’un autre ordre que les genres, par exemple des termes transcendentaux comme l’être et le néant. Et de fait, nous lisons dans les Catégories et dans le livre Δ de la Métaphysique que les contraires peuvent appartenir à des genres différents[1]. Mais déjà dans les Catégories[2] Aristote donne la définition précise avec ἐν τῷ αὐτῷ γένει, et il la présente même comme traditionnelle ou usuelle. Enfin, dans la Métaphysique (Ι, 4 déb.), il identifie la contrariété avec la « différence » maxima, et il fait voir que la différence maxima est, du même coup, la différence parfaite ou complète (τελεία διαφορά) ; car il n’y a rien dans le genre au-delà de ce qui y est au maximum de distance[3]. Il n’y a nul doute que la définition ici donnée soit l’expression de la pensée définitive d’Aristote. Non seulement cela résulte de la date du livre Ι de la Métaphysique et du caractère de maturité qu’il présente[4] ; cela résulte encore de ce qu’Aristote nous laisse voir la raison et la source de la définition dont il s’agit. Il définit les contraires en vue de la physique et en fonction de considérations physiques[5]. Ainsi les termes qui s’opposent comme

  1. Métaph. Δ, 10, 1018 a, 25 : ἐναντία λέγεται τά τε μὴ δυνατὰ ἅμα τῷ αὐτῷ παρεῖναι τῶν διαφερόντων κατὰ γένος, καὶ τὰ πλεῖστον διαφέροντα τῶν ἐν τῷ αὐτῷ γένει, καὶ τὰ πλεῖστον διαφέροντα τῶν ὑπὸ τὴν αὐτὴν δύναμιν [comme exemple de contraires de cet ordre, on pourrait citer la santé et la maladie], καὶ ὧν ἡ διαφορὰ μεγίστη ἢ ἁπλῶς ἢ κατὰ γένος ἢ κατ’ εἶδος. Cat. 11, 14 a, 19 : ἀνάγκη δὲ πάντα τὰ ἐναντία ἢ ἐν τῷ αὐτῷ γένει εἶναι ἢ ἐν τοῖς ἐναντίοις γένεσιν, ἢ αὐτὰ γένη εἶναι. λευκὸν μὲν γὰρ καὶ μέλαν ἐν τῷ αὐτῷ γένει (χρῶμα γὰρ αὐτῶν τὸ γένος), δικαιοσύνη δὲ καὶ ἀδικία ἐν τοῖς ἐναντίοις γένεσιν (τοῦ μὲν γὰρ ἀρετή, τοῦ δὲ κακία τὸ γένος)· ἀγαθὸν δὲ καὶ κακὸν οὐκ ἔστιν ἐν γένει, ἀλλ’ αὐτὰ τυγχάνει γένη τινῶν ὄντα.
  2. Cat. 6, 6 a, 17 (à la suite du texte cité p. 134, n. 1) : τὰ γὰρ πλεῖστον ἀλλήλων διεστηκότα τῶν ἐν τῷ αὐτῷ γένει ἐναντία ὁρίζονται.
  3. ἐπεὶ δὲ διαφέρειν ἐνδέχεται ἀλλήλων τὰ διαφέροντα πλεῖον καὶ ἔλαττον, ἔστι τις καὶ μεγίστη διαφορά, καὶ ταύτην λέγω ἐναντίωσιν. Cf. un peu plus bas, 1055 a, 10-16, la définition de la τελεία διαφορά.
  4. Voir Zeller, p. 215, milieu (n. 4 de la p. 214).
  5. Métaph. Ι, 4, 1055 a, 6 : τὰ μὲν γὰρ γένει διαφέροντα οὐκ ἔχει ὁδὸν εἰς ἄλληλα, ἀλλ’ ἀπέχει πλέον καὶ ἀσύμβλητα· τοῖς δ’ εἴδει διαφέρουσιν αἱ γενέσεις ἐκ τῶν ἐναντίων εἰσὶν ὡς ἐσχάτων… Cf. b, 11.