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que à Nicomaque, III, 8, 1108 b, 33 : « On appelle contraires des termes qui sont éloignés l’un de l’autre au maximum » (τὰ δὲ πλεῖστον ἀπέχοντα ἀλλήλων ἐναντία ὁρίζονται). Cette définition très extérieure est d’accord avec cette idée que le premier type de la contrariété doit être cherché dans l’espace[1]. Mais il est clair que le caractère d’éloignement maximum ne suffit pas à définir les contraires ; car, comme dit la Métaphysique (1, 4, 1055 a, 6 ; p. 135, n. 5), il n’y a point de contrariété entre des choses qui sont trop diverses, trop étrangères l’une à l’autre pour être comparables, entre des ἀσύμβλητα. Il faut donc chercher quelque chose de commun entre les deux contraires. Ce quelque chose de commun peut être l’identité de sujet[2]. Mais l’identité de sujet se ramène, en vertu de la parenté de la matière et du genre, à l’identité de genre. C’est bien celle-ci qu’Aristote va finir par faire entrer dans la définition des contraires. Toutefois il y a chez lui sur ce point, au moins avant l’époque, sans doute tardive, à laquelle il écrit le livre Ι de la Métaphysique, beaucoup d’hésitation. Simplicius nous dit[3] que, dans le περὶ ἀντικειμένων, Aristote examinait et redressait une vieille définition des contraires, ainsi conçue : ὅσα ἐν τῷ γένει πλεῖστον ἀλλήλων διαφέροντα. Puisque la correction d’Aristote a consisté, selon la remarque du commentateur, à remplacer ἐν τῷ γένει par ἐν τῷ γένει, les mots ἐν τῷ αὐτῷ γένει ne pouvaient signifier que ceci : pour que deux termes, très éloignés l’un de l’autre, soient des contraires, il faut qu’ils diffèrent le plus possible quant au genre. Autrement dit, des genres peuvent être contraires l’un à l’autre, le

  1. Cat. 6, 6 a, 12 : μάλιστα δὲ ἡ ἐναντιότης τοῦ ποσοῦ περὶ τὸν τόπον δοκεῖ ὑπάρχειν. τὸ γὰρ ἄνω τῷ κάτω ἐναντίον τιθέασι, τὴν πρὸς τὸ μέσον χώραν κάτω λέγοντες διὰ τὸ πλείστην τῷ μέσῳ διάστασιν πρὸς τὰ πέρατα τοῦ κόσμου εἶναι. ἐοίκασι δὲ καὶ τὸν τῶν ἄλλων ἐναντίων ὁρισμὸν ἀπὸ τούτων ἐπιφέρειν…
  2. Ibid. 11, 14 a, 15 : δῆλον δὲ ὅτι καὶ περὶ ταὐτὸν ἢ εἴδει ἢ γένει πέφυκε γίνεσθαι τὰ ἐναντία. νόσος μὲν γὰρ καὶ ὑγίεια ἐν σώματι ζῴου, λευκότης δὲ καὶ μελανία ἁπλῶς ἐν σώματι, δικαιοσύνη δὲ καὶ ἀδικία ἐν ψυχῇ ἀνθρώπου..
  3. Fr. 115 (Rose), 1497 b, 3-14 (de son commentaire des Catégories, 387, 21, 27, éd. Kalbfleisch). Sur le περὶ ἀντικειμένων, voir supra.