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tir déjà les gaietés opulentes et triomphales de Véronèse.

Si, dans le domaine religieux, Titien fut, au moins une fois, plus pathétique, jamais il ne s’est montré plus grave ou plus sobrement magnifique. Ces deux œuvres de sa vigoureuse maturité marquent l’apogée de sa carrière. L’importance qu’il attachait à la première nous est attestée par le fait qu’il l’a lui-même gravée ; les recherches qui précédèrent l’exécution de la seconde, par les dessins et les esquisses peintes qui lui servirent de préparation. La période d’une trentaine d’années qui va de 1516 à 1546 et un peu au delà nous montre Titien dans la plénitude de son génie et dans toute la force de sa production.

En même temps qu’il travaillait pour les églises, Titien ne cessait de satisfaire aux goûts de ces princes lettrés et artistes qui ont donné une si heureuse impulsion à la Renaissance italienne. Dès l’année 1518, nous le voyons en relations avec un neveu d’Alphonse d’Este, Federico Gonzaga, marquis de Mantoue. Ce prince, de manières fines et caressantes, passionné d’art, eut pour le maître les plus délicates attentions, fut pour lui un ami autant qu’un protecteur. La Mise au Tombeau du Louvre fit primitivement partie de la collection des Gonzague.

Au point de vue du sentiment religieux, la Mise au Tombeau peut être considérée comme le chef-d’œuvre de Titien. Nulle part, il n’a mieux adapté le langage des formes et des couleurs à l’expression morale d’un sujet ; nulle part, il n’a été à la fois plus sensible, plus savant et plus fleuri. Il y a une manière qui est toute italienne,