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équilibre du style. L’influence de l’École romaine s’y fait sentir dans l’agrandissement héroïque de la forme et la disposition majestueuse des masses. Les personnages, plus grands que nature, s’y meuvent avec une aisance souveraine, emportés par un large souffle lyrique. En bas, les apôtres réunis autour de la tombe, se détachent en masse sombre sur’horizon vide, groupe agité aux silhouettes parlantes, d’une tonalité sourde et vigoureuse. Ils s’étonnent et s’affligent, ils lèvent les mains et les yeux vers le ciel et suivent l’essor de la Vierge qui, portée par les nuages, soutenue, entourée d’une couronne d’anges, monte vers la gloire dorée du Paradis où l’accueille le Père.

L’Assomption est de ces œuvres parfaitement équilibrées qui représentent moins l’originalité propre du génie, que ses qualités de goût et de mesure, d’ordonnance et de raison. Et cependant une veine de naïveté persiste encore dans l’œuvre de Titien ; on en retrouve les traces dans l’Annonciation de la cathédrale de Trévise, qui date de 1519. La disposition en est fort imprévue. La Vierge, agenouillée au premier plan, sur le parvis de l’église, tourne vers le spectateur son visage modeste et charmant. Un ange adolescent qui vient du ciel et se pose d’un vol si léger, a je ne sais quelle grâce primitive ; et le donateur agenouillé à l’autre extrémité du parvis met aussi une note de candeur archaïque dans cette toile aux lignes simples et sévères. Comme tous les grands artistes de son temps, Titien allie le paganisme au sentiment chrétien. Il donne aux