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inévitables, on trouvera que Michel-Ange rendait pleine justice au maître qui différait si fort de lui. Au vrai, le naturalisme poétique de l’un gardait tous ses droits en face de la haute et sombre imagination de l’autre ; l’erreur fut de vouloir fondre en un éclectisme bâtard deux conceptions de la nature et de l’art foncièrement incompatibles : la couleur de Titien et le dessin de Michel-Ange.

Naturellement, pendant son séjour à Rome, l’activité de Titien fut consacrée aux Farnèse. Il peignit d’abord un groupe représentant le Pape Paul III entre deux de ses petits-fils, le cardinal Alessandro et Ottavio Farnèse, gendre de Charles-Quint. Cette toile, qui est au musée de Naples, est restée inachevée on ne sait pour quelle cause. Ce même Ottavio commanda à Titien plusieurs mythologies. La première est la fameuse Danaé du musée de Naples : un beau corps de femme, couchée dans une souple et voluptueuse attitude. La sensualité naïve de la Renaissance s’exprime là avec une liberté tout antique. Le nu est traité avec une largeur, avec une souplesse et une plénitude où l’on reconnaît l’influence de Michel-Ange, mais plus encore celle de la statuaire grecque. Pour ce même Ottavio, Titien peignit de sa touche la plus vibrante et la plus caressante, une blonde et grasse Vénus, nonchalamment étendue sur un lit de repos et jouant avec un petit chien, tandis qu’au pied du lit, un cavalier en qui l’on croit reconnaître Ottavio lui-même, laissant errer ses doigts sur les touches d’un clavier, se retourne pour contempler sa beauté dévoilée. Une baie