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certaines parties où l’on reconnaît la collaboration des élèves ; non sans froideur ; mais elle contient aussi des traits exquis de naïveté. Elle trace la voie à Véronèse et à Rubens.

De cette année encore est une Assomption de la cathédrale de Vérone d’une simplicité charmante.

Moins heureuse est la décoration de l’église Santo-Spirito in Isola transportée plus tard à la Salute où l’influence de l’École romaine se fait trop sentir. Ces pages mouvementées, de jet véhément, de musculatures ronflantes qui représentent : dans le grand tableau au-dessus de l’autel, la Descente du Saint-Esprit et dans les caissons du plafond : les Quatre Évangélistes et les Quatre grands Pères de l’Église, en figures majestueuses ; enfin à la sacristie : le Sacrifice d’Abraham, David et Goliath, le Meurtre d’Abel, attestent une dangereuse tendance à rivaliser avec la vigueur et la majesté de Michel-Ange. Quelque souple que soit la nature de Titien, il ne gagne rien à quitter son naturel exquis pour s’assimiler cette grande manière qui, n’étant pas soutenue par le sublime esprit de son inventeur, tourne aisément à l’emphase ronflante et au faste théâtral.

Les instances du Pape et l’espoir d’obtenir, par l’entremise du cardinal Alessandro, le bénéfice tant désiré pour Pomponio, décidèrent enfin Titien à faire le voyage de Rome. Le duc d’Urbin lui fournit une escorte de sept cavaliers et le maître fut reçu au Vatican avec des honneurs princiers. L’antiquité le ravit. Dans une lettre à