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introduction à l’histoire

tout intérêt, sauf pour les curieux de choses mortes. Les dépôts où ils s’entassent peuvent donc être sans risques ouverts largement à tous, en même temps que les bibliothèques de manuscrits, moins dispersées et mieux adaptées aux besoins des chercheurs, deviennent elles-mêmes plus accessibles : occasion tentante offerte aux historiens de reprendre dans des conditions favorables des recherches dont les circonstances les ont pendant nombre d’années détournés.

Aussi partout se remettent-ils au travail avec une ardeur sans pareille. Dans l’enthousiasme de tant de trésors soudain dévoilés, de vastes collections documentaires sont entreprises et publiées, tant en France qu’à l’étranger, notamment en Allemagne, en Angleterre, en Belgique, en Italie, en Espagne : Monumenta Germaniae historica (1826), Société de l’histoire de France (1835), Documents inédits relatifs à l’histoire de France (1835), collection des Chroniques belges inédites (1836), Historiae patriae monumenta de Turin (1836), Colección de documentos ineditos para la historia de España (1842), Calendars of State papers (1856), Rerum britannicarum medii aevi scriptores (1858), etc.

Peu à peu l’enquête documentaire s’élargit, se double d’une enquête critique, qui bénéficie, à son tour, des progrès réalisés parallèlement en Allemagne, puis en France, en Angleterre et ailleurs dans le domaine des études philologiques et dans celui des études archéologiques.

Entre l’érudition et l’histoire proprement dite, le fossé tend à se combler. Un Guizot, un Ranke ont manié les documents et, avec plus ou moins de compétence et de bonheur, en ont fait la critique ; le premier d’entre eux a été l’initiateur du grand recueil français des Documents inédits et a attaché son nom à une ample collection de traductions : la Collection des mémoires relatifs à l’histoire de France… jusqu’au XIIIe siècle (1824-1835) ; Michelet lui-même, malgré son lyrisme, a été un certain temps archiviste et s’est nourri d’érudition. Et si, délaissant les œuvres maîtresses, on se reporte de préférence à celles, de portée souvent modeste, dues à la plume d’historiens de second plan, on constate, de décade en décade, un constant