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SA VIE ET SES AVENTURES.

personnage à la fois aussi célèbre et aussi décrié que Beaumarchais : il lança donc sous le nom de Kornman, un mémoire véhément contre la dame Kornman, Daudet de Jossan, Beaumarchais, Lenoir et le prince de Nassau-Siegen.

En d’autres temps, Beaumarchais fût vite venu à bout d’un tel adversaire. Mais sa verve d’antan s’était refroidie. Puis, en quelques années, la France avait changé d’humeur. Au moment de la première représentation du Mariage de Figaro, « critiquer et rire, disait Mme Campan, étaient la disposition de l’esprit français ». Maintenant on critiquait, et toujours plus haut. On riait moins. Bergasse, avec ses indignations tumultueuses et ses sombres prophéties, remuait la foule plus sûrement que Beaumarchais, avec sa gaîté ironique.

Dans ses mémoires, celui-ci avait beau discuter de la façon la plus claire et la plus probante les accusations dont on voulait le charger, le public, ayant vite oublié le fond de l’affaire, n’avait d’oreilles que pour Bergasse. L’avocat, tout en reprochant à ses adversaires d’avoir obtenu la révocation d’une lettre de cachet (c’était tout le procès), attaquait les ministres, flétrissait les abus d’autorité, insultait Lenoir, insultait Daudet et insultait surtout Beaumarchais. « Malheureux ! criait-il, tu sues le crime ! » et la foule battait des mains.

Plus de deux cents libelles contre Beaumarchais