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SA VIE ET SES AVENTURES.

dans les loges des comédiennes pour être les premières à pénétrer dans la salle. Des duchesses étaient placées aux balcons entre la Carline et la Duthé. Le succès fut extraordinaire. Et Beaumarchais assista au triomphe de sa comédie, du fond d’une loge, entre deux ecclésiastiques, l’abbé Sabathier et l’abbé de Calonne, qu’il avait mandés pour lui administrer « quelques confortatifs et des secours très spirituels au moment de la crise ».

Il y eut soixante-huit représentations presque consécutives du Mariage de Figaro.

Les ennemis de Beaumarchais lui firent payer cher sa victoire. Ils le criblèrent de chansons, d’épigrammes et de calomnies. Beaumarchais riposta. Il voulut faire mieux encore : puisqu’on accusait son œuvre d’immoralité, il déclara dans les journaux qu’il allait en consacrer tout le produit à une œuvre de bienfaisance, en faveur des pauvres mères nourrices. Les railleurs ne désarmèrent pas. Beaumarchais écrivit alors sa Préface du Mariage, l’un des morceaux les plus étincelants qui soient sortis de sa plume. Mais la cabale était puissante, et, d’ailleurs, quelques esprits clairvoyants avaient compris tout le danger du fol succès de cette Folle Journée.

L’archevêque de Paris, dans un mandement de Carême, avait cru pouvoir désigner et flétrir la comédie en vogue. Beaumarchais, selon sa coutume, répondit au mandement par une chanson. Mais l’ar-