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BEAUMARCHAIS.

recevant dans sa maison de Gennevilliers le comte d’Artois et la duchesse de Polignac, voulut offrir à ses hôtes la comédie de Beaumarchais. Celui-ci, qui était alors en Angleterre, se fit d’abord prier ; puis il consentit, mais en exigeant qu’on soumît le Mariage à un nouveau censeur, « le sévère historien » Gaillard. Le censeur approuva et le roi donna pour cette représentation une autorisation spéciale.

Après avoir paru à Gennevilliers, Figaro ne pouvait plus être longtemps écarté de la Comédie. Le public réclamait le divertissement qu’on avait permis aux courtisans. Beaumarchais demandait de nouveaux censeurs : on les lui donnait et ils approuvaient toujours. Il soumettait sa pièce à une sorte de tribunal « composé d’académiciens français, de censeurs, de gens de lettres, d’hommes du monde et de personnes de la cour » ; et ce tribunal « de décence et de goût » se mettait du parti de l’auteur. Enfin, soit qu’il crût à une chute certaine, soit qu’il jugeât que les suppressions consenties par Beaumarchais rendaient l’œuvre inoffensive, le roi céda.

La première représentation fut donnée le 27 avril 1784. Dès le matin, le théâtre fut assiégé. On vit, au dire de Bachaumont, « les cordons bleus confondus dans la foule et se coudoyant avec les Savoyards ; la garde dispersée ; les portes enfoncées ; les grilles de fer brisées sous les efforts des assaillants ». De grandes dames étaient venues s’enfermer et dîner