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SES MÉMOIRES ET SON THÉÂTRE.

La Blache. Il a allégé, simplifié, éclairé, animé la vieille plaidoirie. Voltaire écrivait à propos du quatrième mémoire : « Il n’y a point d’histoire mieux contée et surtout point d’affaire épineuse mieux éclaircie ». La force et la clarté de la dialectique, voilà les premiers mérites des factums de Beaumarchais.

Il sait, comme personne, les recettes, les habiletés et les roueries du métier de plaideur. Il classe son dossier avec une merveilleuse adresse ; il débrouille les faits et donne tout de suite aux juges l’opinion que la cause est simple : ses exposés sont des chefs-d’œuvre. Il sait disposer ses preuves, jeter les plus faibles en avant et ménager les meilleures pour le suprême engagement, lorsque l’ennemi est déjà fatigué et le public amusé par les escarmouches. Il trouve les ironies et les saillies qu’il faut pour relever une mauvaise raison ; il donne à la calomnie l’accent des indignations généreuses ; il abrite ses attaques et ses insultes contre les particuliers en protestant de son respect pour leur état ou leur fonction. Il coupe de commentaires adroits et d’interjections véhémentes la lecture des documents ; par des retours opportuns, il ramène l’attention sur les arguments essentiels ; il va de résumé en résumé, poussant toujours sa discussion en avant, et nous communique l’impression qu’ « à mesure qu’on avance, le tableau se nettoie ».