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BEAUMARCHAIS.

pouvait pas traiter Figaro, c’est-à-dire lui-même, moins bien que les enfants de sa fantaisie, et c’est pour lui surtout qu’il a été prodigue de ces traits aigus et de ces mordantes reparties où il excellait. Dans la monnaie de nos conversations et de nos disputes, combien de pièces frappées à l’effigie de Figaro !

Cela pourtant n’eût pas suffi à faire de Figaro l’un des personnages les plus populaires de la littérature française. Avec toute sa science de la vie, avec toutes les ressources de son merveilleux esprit, Beaumarchais eût pu composer de ses souvenirs et de ses indignations un chef-d’œuvre dramatique ; mais il n’aurait pas transformé sa propre image en un type immortel, si, dans cette image, tout un peuple n’avait pas reconnu certains traits de sa propre physionomie.

Quand l’étude de Loménie sur Beaumarchais parut dans la Revue des Deux Mondes, Carlyle écrivit à Montégut une lettre qui se terminait ainsi : « Beaumarchais était après tout une belle et vaillante espèce d’homme et, dans son genre, un brillant spécimen du génie français ». Carlyle exagère. D’ailleurs, il ne connaissait le personnage que par le livre de M. de Loménie, et, depuis cette publication, on a mis en lumière certaines pages de la vie de Beaumarchais, dont la lecture eût obligé Carlyle à quelques réserves. Mais il reste vrai que