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de solitude, de satisfaction, de vie enfin emplissait tout mon être.

—Qui que tu sois, voyageur, je bois à ta santé, dis-je tout haut, comme j’allais donner à la bouteille sa première accolade.

—Je vais trinquer avec toi, étranger, me répondît une voix, à laquelle je ne m’attendais guère. Surpris, je regardai tout autour, ça et là dans la verte clairière, mais à traversTavenue splitaire, les flots de feuilles et d’herbes n’étaient troublés que par quelques ombres tremblantes ou le passage rapide de quelques oiseaux. ’ • ■

Coucou là là 1 coucou là là ! se mit à chanter ’.a voix. C’est le refrain d’une chanson ardennaise, que chantent les paysans en vieille langue Wallonne ; l’air exprimait à ce moment toute la fraîcheur et la gaieté de la vie libre des bois. Cette voix si joyeuse faisait écho au-dessus de moi, parmi les feuilles, et en élevant le regard, je vis, se tenant à une grosse branche de bouleau, à mi-chemin, entre moi et la voûte verte, une figure étrange de petit garçon avec de-longs cheveux, une face halée par le soleil et de grands yeux noirs, presque toujours en mouvement, quoique pleins de gaiçtè. Voyant que je l’avais aperçu, il se laissa choir de la branche sur le sol,et se serait enfui si je ne l’eusse saisi par le bras. C’était ,un jeune gars d’environ quatorze ans, sauvage, ombrageux et libre comme l’oiseau.

—Laissez-moi m’en aller, cria-t-il. Nous jouons à cachecache ; si vous ne me laissez pas courir, Stéphanie me trouvera.

Une petite face épanouie se montra au travers des feuilles,, comme* l’enfant parlait, mais disparut comme un oiseau effa- rouché en voyant l’étranger.

—Eh bien, va me chercher Stéphanie, lui dis-je, et vous aurez tous deux ces gâteaux et tout ce que tu vois empilé sur l’herbe.

Je ne l’eus pas sitôt lâché, qu’il partit comme une flèche, et je doutai fort que la promesse des gâteaux serait assez puis-^ santé pour venir à, bout de sa méfiance sauvage et me le rame-