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BAUDEVILLE

pris la peine de lire sont hérissées de fautes ; elles offrent les disparates les plus choquantes, un mélange d’archaïsme et de platitude moderne. Malgré les efforts, souvent heureux, de l’éditeur pour séparer le bon grain de l’ivraie, il est impossible de se prononcer sur la valeur littéraire de l’œuvre ; mais, au point de vue historique et à celui de la composition, cette œuvre reste intéressante. Nous nous trouvons parfois en présence d’un mystère du moyen âge, avec des apparitions d’anges et des échappées sur l’enfer ; parfois aussi, une scène pleine de vie et de réalisme, un contraste énergiquement indiqué, font songer au drame de Shakspeare. Les gueux, les matelots, les paysans, le bourreau et ses aides, les gens d’armes et les chevaliers forment une galerie curieuse, un tableau animé de la société française et bretonne, à la fin du XVIesiècle ; un passage que M. Ropartz a connu trop tard, et qui n’a pas pris place dans son livre, fait, avec un cynisme qui commente les excès de la Ligue, l’apologie du meurtre accompli par ordre divin. Toutes ces causes, et le caractère breton de l’œuvre, sa topographie, si je puis ainsi parler, m’ont engagé à en présenter une analyse succincte, accompagnée d’extraits qui la feront apprécier.

Après un prologue qui recommande à l’attention du public breton ce sujet d’intérêt tout local, nous voyons Armel, dans son manoir d’Angleterre, répandant ses bienfaits sur les pauvres du pays ; parmi ces mendiants, il y a de sinistres drôles, des gueux