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L’ABBÉ DE FRANCHEVILLE

entrées comme motifs de mes desseins et de mes actions. »

L’abbé de Montigny mourut en 1671, et Chapelain en 1674. Que devint l’abbé de Francheville pendant les quinze ans qui suivirent ? Continua-t-il à admirer la Mère Nature dans sa solitude bretonne, ou à charmer les ruelles de ses madrigaux et de ses épigrammes ? Il nous est impossible de le dire, car nous perdons absolument sa trace, dans tous les mémoires du temps, jusqu’au moment où il abandonna pour toujours la carrière ecclésiastique.

Ici, l’abbé de Francheville nous ménage une singulière surprise. Changement de décor à vue : — À l’âge de soixante ans, vers l’année 1687, il quitte le petit collet, se marie, prend le nom de M. de Guébriac, et revient définitivement en Bretagne, pour y terminer ses jours. C’est Mme de Sévigné qui nous apprend ces détails. Elle nous fait même de la vieillesse de l’ancien abbé un si charmant portrait que j’aurais mauvaise grâce à ne pas lui laisser la parole. Elle écrivait, des Rochers, à Mme de Grignan, le mercredi 28 septembre 1689 :

« Nous avons ici un abbé de Francheville qui a bien de l’esprit, agréable, naturel, savant sans orgueil ; Montreuil le connaît. Il a passé sa vie à Paris ; il vous a vue deux fois, vous êtes demeurée dans son cerveau comme une divinité ; il est grand cartésien ; c’est le maître de Mlle Descartes ; elle lui a montré votre lettre, il l’a admirée et votre esprit tout lumineux ; le sien me plait et me divertit infiniment : il y a longtemps que je ne m’étois trouvée en si bonne compagnie. Il appelle mon fils Nate