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RENÉ LE PAYS

on dirait, au contraire, que ce soi-disant poète breton s’est plu à imiter servilement et sérieusement M. Thibaudier. Je n’en veux pour preuve que cette citation :

« J’ay reçeu vos noix confites, et j’en ay déjà mangé beaucoup, et je les ay trouvées excellentes ; mais, Madame, ce ne sont pas là les douceurs que je vous demandons par mon dernier billet :

Alors qu’un pauvre Amour pleure et se désespère,
De semblables douceurs augmentent sa colère ;
C’est une cruauté que le ciel vous deffend ;
Ouy, quand on voit l’amour en des peines si dures,
C’est trop le traiter en enfant,
Que d’apaiser son mal avec des confitures. »

Des élégies fades, des épigrammes émoussées, des sonnets sans pointes, des déclarations d’amour sans passion ni bon goût, des madrigaux sans trait, des églogues ou des satires sans fraîcheur et sans style, des galanteries à donner des nausées, voilà l’œuvre de ce pauvre poète qui se plaît à entremêler vers et prose, et auprès duquel Saint-Évremond est un Homère et le galant Dumoustier un Horace.

Je ne citerai de lui que le seizième sonnet, non qu’il soit un chef-d’œuvre, mais il est inspiré par une vue de la Loire. Cette pièce passe du sévère au plaisant, comme le fameux sonnet du coude, de Scarron :

Vers l’endroit où la Loire entre dedans la mer,
Assez près de cette isle et fertile et charmante,