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À M. Louvigny de Montigny

par « des années de domination étrangère, et plus encore par les changements que la Révolution et ses conséquences ont opéré dans l’état politique, moral et social de la France. » Les événements récents n’ont pas rendu le contact plus facile. Sans doute, la prudence, l’intérêt personnel m’engageraient à passer sous silence qu’il existe des questions brûlantes, à feindre de les ignorer. Cette politique de l’autruche manquerait de loyauté et de franchise. Nul plus que l’auteur de ces lignes ne déplore ces divergences d’idées et ce fossé peut-être infranchissable qui se creuse entre nos deux pays. Combien de fois n’a-t-il pas rencontré chez vos auteurs des phrases, des pensées, des convictions, en désaccord complet non pas avec les tendances de nos partis extrêmes, mais avec ce qui est aujourd’hui dans notre pays l’opinion courante !

Et vraiment, mon cher ami, ce n’est pas sans appréhension que je termine ce livre. Dans mon premier volume auquel on a fait des deux côtés de l’Atlantique un accueil auquel j’étais loin de m’attendre, j’avais vraiment la partie belle. Il suffisait de rappeler les souvenirs glorieux de votre histoire, la lutte pour votre langue, pour votre foi, pour votre liberté. Mais les temps héroïques sont passés. Morts, les Gaspé, les Garneau, les Crémazie ! J’ai retracé du mieux que j’ai pu la légende du peuple canadien, et vos critiques eux-mêmes ont reconnu que si je me suis trompé parfois, j’ai fait mes efforts pour comprendre. Aujourd’hui, je traite d’idées contemporaines. Comment le