Page:Haase - Syntaxe française du XVIIe siècle.djvu/38

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

peut constater cet emploi courant encore dans le langage du peuple. [Il a ben lontan que je t’ai vu. (H. Monn., I, 116.)]

Ex. : Je sais qu’il s’élève des vapeurs bien chaudes de cette veine de souffre, que vous dites qu’il a alentour du cœur. (Balz., Lettr., IX, 59.) — Quelque passion que j’aie pour la guerre, il en a quelque autre qui est bien plus forte en moi. (Voit., I, 65.) — Voilà ce que je devois vous avoir écrit il a longtemps. (Id., I, 584.) — Tant il est difficile de ne point démonter un jugement de son assiette naturelle, ou plutôt tant il en a peu de ferme et stable ! (Pasc., Pens., I, 40.) — Il m’a paru que la véritable cause est qu’il en a de vrais. (Id., Pens., II, 71.) — Pensez-vous... Qu’il eût en ce péril de quoi tant m’ébranler ? (Mol., Princ. d’Élide, I, 3, 284) — N’a pas longtemps de Rome revenoit Certain cadet. (La Font., Contes, I, 3, 1.)

Jusqu’en plein xviie siècle, y pouvait être omis aussi dans il y va.

Ex. : Aux choses où, il ne va que de mon intérêt, je me commets volontiers à la fortune. (Malh., IV, 188.) — C’est une affaire où il va de mon honneur. (Vaugel., Rem., II, 422.) — Ici où il va de tout. (Pasc, Pens., I, 323.) — Procès où il ne va jamais moins que de sa vie. (Sév., II, 235.)

Palsgrave (p. 413) constate qu’on omet « parfois » y dans : il y a ; les autres grammairiens ne parlent pas de cet emploi.

Remarque I. Y implique une idée de lieu sans rapport à un antécédent dans des phrases où l’on s’attendrait peut-être à un le attributif. On ne peut pas être mieux ensemble que nous y sommes. (Sév., V, 289.) — Étant tous aussi bien ensemble que nous y sommes. (Id., VII, 346.)

Remarque II. On évite aujourd’hui, par euphonie, y devant le futur du verbe aller. Cf. au contraire, au xviie siècle : Quoiqu’elles ne soient pas bien importantes (mes lettres), je voudrois qu’elles allassent jusqu’à vous. Celle-ci y ira. (Maint. à M. d’Aubigné, 31 déc. 1673[1].) — Non, je n’y irai pas, ils n’y iront pas eux-mêmes. (Fén., Tél., VI[2].)

II. Y dans son acception de pronom s’employait avec une liberté absolue dans l’ancienne langue, et l’usage s’en maintient encore dans la langue populaire. [Quand l’Empereur a été trahi, que tout le monde y a tourné le dos, c’était pas facile de l’remplacer. (H. Monn., I, 356.)]

  1. Éd. La Beaumelle 1758.
  2. Livre VII de la division en XXIV livres.