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explicite au verbe quand il est employé à un mode personnel. Même construction dans les phrases : le voilà qui vient ; je le vois qui vient, où le n’est pas à proprement parler l’antécédent de qui, mais sert seulement à annoncer le complément qui doit suivre sous forme de proposition relative sans antécédents[1]. La langue moderne ne se sert plus de pareilles constructions : au xviie siècle elles ne sont pas rares ; Cf. Il est bien loin de là qui s’emporte dans les nues. (Balz., Diss. chr., VIII). — Pour la première fois il me dupe qui veut. Mais pour une seconde, il m’attrappe qui peut. (Corn., Mél., V, 5. 1681 et 1682.) — Tous ont voulu être des amis de Philotas, mais il ne l’étoit pas qui vouloit. (Vaug., Q.-C., VII, 1.)

L’ancienne langue admettait aussi des propositions relatives avec un verbe à la 1ere ou à la 2e personne, et ne se rapportant pas, comme l’exige la langue actuelle, à un substantif ou à un pronom personnel tonique. Dans ce cas, le pronom relatif semble se rapporter au pronom sujet atone du verbe de la principale. Cette construction est assez fréquente au xviie siècle. Cf. Comme supporterois-je d’un homme qui ne puis pas supporter le vin. (Malh., II, 643.) — Comme seriez-vous âpre à exiger, qui avez si peu de patience à rendre. (Id., II, 210.) — Pour vous, Monsieur, vous n’en feriez pas de même ; qui êtes capable de tout. (Balz., Lettr. à Chapel., VI, 6.) — Je vous remercie tout ce que vous êtes ici, qui êtes la fleur et l’élite de nos citoyens. (Vaugel., Q.-C., IX, 6.) — Qui que tu sois qui as sacrifié à l’Amour... garde-toi d’entrer. (La Font., Psy., II, p. 178.) — Qui que vous soyez qui m’écoutez ici, il a été un temps où le péché régnoit en vous. (Mass., Car., Petit nombre des Élus, 1.) — Cf. Elle croit son miroir et me croit aussi, qui sommes plus fidèles que vous. (Balz., Lettr., IX, 7.)

§ 2. A. Le pronom neutre il, inconnu à la plus ancienne période de la langue, gagne de plus en plus de terrain et tient souvent la place du démonstratif cela et ce, tandis que le français moderne ne l’emploie que dans des incises comme : il est vrai[2].

Ex. : De trouver tant d’ornements et tant de figures, il ne se peut sans avoir le trésor des paroles. (Balz., Lettr., IX, 7.) — On a de la vénération pour ce que l’on aime ; il est bien juste. (Pasc, Disc. pass. F., I, 114.) D’autres soutiennent que ces pronoms sont toujours masculins, mais qu’à cause de la cacophonie on ne laisse

  1. La plupart des grammairiens n’en persistent pas moins, et avec raison à ce qu’il nous semble, à considérer le pronom le ici comme un véritable antécédent.
  2. La langue actuelle n’emploie guère il que lorsque la proposition impersonnelle est déterminée par un complément. (Il est vrai que j’ai dit cela ; mais : c’est juste.)