Page:H G Wells La guerre des mondes 1906.djvu/226

Cette page a été validée par deux contributeurs.

des trains qui ramenaient gratis les gens chez eux. Le premier flot s’étant déjà écoulé, il n’y avait heureusement que peu de voyageurs dans le train et je ne me sentais guère disposé à soutenir une conversation occasionnelle. Je m’installai seul dans un compartiment, et, les bras croisés, je contemplai, par la portière ouverte le lamentable spectacle de toute cette dévastation ensoleillée. Au sortir de la gare, le train cahota sur une voie temporaire. De chaque côté les maisons n’étaient que des ruines noircies. À l’embranchement de Clapham, Londres apparut tout barbouillé par la poussière de la Fumée Noire, malgré les deux derniers jours d’orages et de pluies. Là aussi, une partie de la voie avait été détruite, et des centaines d’ouvriers — commis sans emploi et gens de magasins — travaillaient à côté des terrassiers ordinaires, et nous fûmes encore cahotés sur une voie provisoire, hâtivement établie.

Tout au long de la ligne, l’aspect de la contrée était désolé et bouleversé. Wimbledon avait particulièrement souffert ; Walton, grâce à ses bois de sapins qui n’avaient pas été incendiés, parut être la localité la moins endommagée. La Wandle, la Mole, tous les cours d’eaux n’étaient que des masses enchevêtrées d’Herbe Rouge. Les forêts de pins du Surrey étaient des endroits trop secs pour que ces végétations les envahissent. Après la gare de Wimbledon, on voyait des fenêtres du train, dans des pépinières, les masses de terres remuées par la chute du sixième cylindre. Un certain nombre de gens se promenaient là, et des troupes du génie