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PREMIÈRE ÉPOQUE

par exemple, dans le monde minéral, qui est le monde des alchimistes, le principe mâle était l’arsenic, comme l’indique le nom même de ce corps ; car ἀρσενιχόν (arsenic) signifie littéralement mâle, ou principe actif. Le cuivre, consacré à Vénus, était le principe femelle. On sait qu’un des principaux problèmes que les alchimistes s’étaient proposé de résoudre était la conversion des métaux vils en métaux nobles (or et argent). Or, l’arsenic (principe mâle) s’unissant au cuivre (principe femelle) donne naissance à un alliage (cuivre blanc), qui, par son aspect, ressemble à l’argent, et que certains adeptes vendaient pour de l’argent véritable.

C’est ainsi que les disciples de l’art sacré, les alchimistes, empruntèrent aux spéculations des philosophes anciens beaucoup de théories, pour les appliquer à leurs opérations et en donner des interprétations allégoriques.

Le Gange est pour les Indiens ce que le Nil fut pour les Égyptiens : c’est sur les bords de ces fleuves sacrés qu’est venue s’asseoir cette civilisation antique, qui de là s’est répandue dans tous les pays de l’Occident. Aussi l’eau, principe fécondant de la mère commune, alma tellus, joue-t-elle un rôle important dans les cérémonies religieuses ainsi que dans les théories philosophiques et scientifiques de ces nations..

« L’eau est le principe de toutes choses. » Cette idée, que Thalès avait empruntée aux Égyptiens, se retrouve dans les livres sacrés de l’Inde (1[1]). C’est à cet élément, emblème de la purification, que s’adresse le prêtre lorsqu’il récite le texte sacré de l’expiation. « Eau, tu pénètres toutes choses ; tu es la bouche de l’univers ; tu es le mot mystique vasha ; tu es la lumière, le goût et le fluide immortel (2[2]). »

Fidèles aux traditions anciennes, les alchimistes s’emparèrent plus tard de l’idée que l’eau est le principe de toutes choses, et ils la transportèrent dans le monde minéral. Mais ici il fallait entendre par eau, non plus l’eau commune des rivières, mais l’eau philosophale, une eau pesante, ne mouillant qu’un très-petit

  1. « L’univers a été produit par l’eau. », Manou, chap. I, v. 8.
  2. Après avoir prononcé ces paroles, le prêtre remplit d’eau le creux de sa main, l’approche du nez, l’aspire par l’une des narines, et la rend, au bout de quelques instants, par l’autre, en se tournant vers le nord-est. C’est là la cérémonie de l’ablution interne, destinée à enlever tous les pêchés. Voy. Colebrooke, Asiatic researches of Calcutta, {{vol.|V, 1799.