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HISTOIRE DE LA CHIMIE

tions des alchimistes qui arrivaient, par des voies extrêmement compliquées, aux résultats auxquels nous parvenons aujourd’hui par des voies fort simples [1].

La doctrine de la transmutation des métaux n’est pas inconnue aux Chinois. On en trouve des traces évidentes dans un livre chinois qui a pour titres : Tsai-y-chi ; on y lit, entre autres, qu’un vieux savant avait changé des racines et des terres en or, en les faisant calciner dans un vase façonné en tête d’oiseau. Dans les annales de Song, on lit : « Yang-kiai, sur la croyance qu’on pouvait changer les tuiles et les pierres en or (hoa-oua-che-ouei-hoang-kin), quitta ses emplois pour travailler au grand œuvre[2]. »

La transmutation des métaux, telle que la concevaient les alchimistes, était donc une idée depuis longtemps répandue en Chine. On ne dira pas que les alchimistes l’aient empruntée aux Chinois, et encore moins que les Chinois l’aient empruntée aux alchimistes de l’Europe. Est-ce là une de ces idées qui en tout temps et en tout lieu se présentent en quelque sorte d’elles-mêmes à toutes les intelligences ? C’est là un sujet digne d’être médité.

Au jugement des voyageurs les plus récents, qui ont pu visiter Pékin à loisir, il faut beaucoup rabattre de la renommée artistique des Chinois. « La forme, dit M. de Kéroulée, n’est rien pour les Chinois ; le prix de la matière première et le plus ou moins de difficulté que l’on peut avoir à la travailler, voilà ce qui constitue le mérite des objets. L’enchevêtrement, le fouillis, le heurté, tout ce qui répugne à l’œil d’un homme de goût, voilà ce qui séduit et enchante les hommes de cette race dépourvue des facultés phrénologiques dont la résultante est ce qu’on appelle le sentiment du beau, le goût artistique… Partout chez les Chinois la patience de l’ouvrier tient lieu de la grâce

  1. Les pharmaciens sont fort nombreux en Chine. Leurs boutiques sont ornées d’une foule de vases et de bocaux, avec des inscriptions, comme chez les pharmaciens d’Europe. Partout à Pékin et dans les villes d’alentour on voit des affiches qui annoncent quelque médicament merveilleux : l’huile de Po-kio, « souverain contre toutes les maladies » ; les pastilles de gin-sing, qui se vendent au poids de l’argent et qui guérissent de la dyssenterie ; les pilules rouges de Kian-tse, qui préservent des insolations, etc. (G. de Kéroulée, Voyage à Pékin, p. 103.)
  2. Mémoires concernant l’histoire, les sciences, les arts, etc., des Chinois, par les missionnaires de Pékin, t. ii, p. 493. (Ouvrage en xiv vol. , 4 ; Paris, 1777).