lui-même, il faudrait qu’il eût déjà existé antérieurement. Si Dieu est cause, il doit être aussi effet ; la cause précède l’effet dans le temps ; mais on ne saurait distinguer en Dieu le passé de l’avenir ou la possibilité de la réalité. Arnauld suit ici un ordre d’idées qui se trouve déjà chez Thomas d’Aquin (Summa theol. Pars I. Quaestio 2. Art. 3). — Descartes réplique que si nous prouvons l’existence de Dieu au moyen du principe de causalité, nous devons aussi appliquer ce principe à Dieu lui-même, ce qui n’est possible que si nous le concevons comme la cause de soi-même. Toutefois il ajoute que l’expression « cause » ne peut être employée que par analogie en parlant de Dieu à cause de l’imperfection de la connaissance humaine et qu’on peut nommer Dieu la cause, mais non l’effet de soi-même : autrement il y aurait quelque chose en Dieu d’un degré inférieur au reste ! La relation de temps n’a du reste absolument aucune valeur pour Dieu, car elle n’est qu’un produit de la conception humaine, un modus cogitandi. — Il semble donc sans contredit qu’il ne reste pas beaucoup de la notion de causalité appliquée à la théologie. La philosophie cartésienne de la religion devait forcément faire naître le besoin d’examiner la légitimité et la signification de nos idées fondamentales dans leur application à la théologie.
Il faut surtout tenir compte du principe que la relation de temps n’a aucune valeur pour Dieu, lorsqu’on voit Descartes enseigner que les vérités éternelles (par exemple une chose ne peut à la fois être et ne pas être, — la somme des angles d’un triangle est égale à deux angles droits) sont dépendantes de la volonté absolue de Dieu. La raison de Dieu et sa volonté ne sont pas distinctes. Dieu n’a pas commencé par saisir les vérités éternelles pour les établir ensuite. Sa volonté est éternelle et immuable comme son essence. Ici encore se montre la grande différence qui sépare l’idée de Dieu selon Descartes de l’idée habituelle de Dieu. Il n’y a proprement pas une seule expression psychologique qui puisse s’appliquer à Dieu. Mais Descartes ne tira pas encore cette conséquence.
Il subsiste encore une difficulté, même si l’on donne raison à Descartes dans toutes ses opinions. Au moyen du doute nous