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les Ioniens, il n’y eut que ceux de Chio qui secoururent les habitants de Milet. Ils leur envoyèrent des troupes, en reconnaissance des secours qu’ils en avaient reçus dans la guerre qu’ils avaient eu à soutenir contre les Érythréens1.

XIX. Enfin, la douzième année, l’armée d’Alyatte ayant mis le feu aux blés, il arriva que la flamme, poussée par un vent violent, se communiqua au temple de Minerve surnommée Assésienne2, et le réduisit en cendres. On ne fit d’abord aucune attention à cet accident ; mais Alyatte, de retour à Sarde avec son armée, étant tombé malade, et sa maladie traînant en longueur, il envoya à Delphes des députés pour consulter le dieu sur sa maladie, soit qu’il eût pris cette résolution de lui-même, soit qu’elle lui eût été suggérée. Ses envoyés étant arrivés à Delphes, la Pythie leur dit qu’elle ne leur rendrait point de réponse qu’ils n’eussent relevé le temple de Minerve qu’ils avaient brûlé à Assésos, dans le pays des Milésiens.

XX. J’ai ouï dire aux habitants de Delphes que la chose s’était passée de la sorte. Mais les Milésiens ajoutent que Périandre, fils de Cypsélus, intime ami de Thrasybule, tyran de Milet, sur la nouvelle de l’oracIe rendu à Alyatte, envoya un courrier à Thrasybule, afin qu’instruit d’avance de la réponse du dieu, il prit des mesures conformes aux conjonctures. Voilà comment les Milésiens disent que la chose s’est passée.

XXI. Alyatte n’eut pas plutôt reçu cet oracle, qu’il envoya un héraut à Milet pour conclure une trêve avec Thrasybule et les Milésiens, jusqu’à ce qu’on eût rebâti le temple. Pendant que le héraut était en chemin pour se rendre à Milet, Thrasybule, bien informé de tout, et qui n’ignorait point les desseins d’Alyatte, s’avisa de cette ruse : tout le blé qu’il y avait à Milet, tant dans ses greniers que dans ceux des particuliers, il le fit apporter sur la place publique. Il commanda ensuite aux Milésiens de boire et de festiner au signal qu’il leur donnerait.

XXII. Thrasybule publia ces ordres, afin que le héraut, voyant un si grand amas de blé, et que les habitants se livraient au plaisir, en fit part à Alyatte : ce qui ne manqua pas d’arriver.


1. Érythrée, ville ionienne. 2. Assésos était une petite ville de la dépendance de Millet. Minerve y avait un temple, et de là elle avait pris le nom de Minerve Assésienne. (L.)