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VIE D’HOMÈRE.

tristes malheurs, et qui, tels que les timides plongeons, tirez une subsistance pénible de cet élément, respectez l’auguste Jupiter Hospitalier, qui règne sur nous. Sa vengeance est terrible : craignez qu’elle n’éclate sur la tête de ceux qui l’offensent. »

Les pêcheurs, ayant levé l’ancre, furent contrariés par les vents, et se virent forcés de revenir au lieu d’où ils étaient partis. Homère était encore assis sur le rivage. Apprenant leur retour, il leur adressa ces paroles : « Vous avez été contrariés par les vents ; recevez-moi sur votre bord, vous en aurez un favorable. » Les pêcheurs, touchés de leur faute, l’engagent à monter sur leur navire, et lui promettent de ne le point abandonner.

XX. Ils le reçoivent sur leurs vaisseaux, lèvent l’ancre, et déjà ils touchent au rivage. Aussitôt ils se mettent à l’ouvrage. Homère passa la nuit sur le bord de la mer. Mais le jour ne commença pas plutôt à paraître, qu’il se mit en route ; et comme il errait de côté et d’autre, il arriva a un lieu nommé Pitys, où il passa la nuit. Pendant qu’il y prenait son repos, le fruit d’un pin tomba sur lui. Les uns appellent ce fruit strobilus, et les autres cône. Homère fit là-dessus ces vers :

« Sur les sommets de l’Ida, toujours agité par les vents, est une espèce de pins, différente des tiens et dont les fruits sont plus agréables. Du sein de cette montagne sortira le fer consacré au dieu de la guerre, lorsqu’elle sera occupée par les Cébréniens. »

Des Cyméens se disposaient alors à bâtir Cébrénies au pied du mont Ida, à l’endroit d’où l’on tire le fer[1].

XXI. Homère, étant parti de ces lieux, se mit en route vers un troupeau de chèvres, dont les cris l’avaient attiré. Les chiens, le voyant approcher, aboyèrent après lui ; il cria. Glaucus, c’était le nom du pasteur, entendant ses cris, accourt en diligence, rappelle ses chiens, et les écarte par ses menaces. Ce berger, surpris de ce qu’un aveugle était venu seul en ces lieux, et ne sachant quel motif l’y

  1. Si l’on n’a commencé à exploiter les mines de fer du mont Ida qu’après la fondation de Cébrénies, que devient la tradition qui attribue cette exploitation aux Dactyles-Idéens ? (Wesseling.)