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HISTOIRE D’HÉRODOTE.

y eut un combat très-vif pour le corps de Masistius. Tant que les trois cents Athéniens furent seuls, ils eurent un très-grand désavantage, et ils abandonnèrent le corps. Mais lorsque le secours fut arrivé, la cavalerie ne put en soutenir le choc ; et, loin d’enlever le corps de son général, elle perdit beaucoup de monde. Les cavaliers, s’étant éloignés d’environ deux stades, délibérèrent sur ce qu’ils devaient faire ; et comme ils n’avaient plus personne pour les commander, il fut décidé qu’on retournerait vers Mardonius.

XXIV. La cavalerie étant arrivée au camp, toute l’armée témoigna la douleur qu’elle ressentait de la perte de Masistius, et Mardonius encore plus que tous les autres. Les Perses se coupèrent la barbe et les cheveux ; ils coupèrent les crins à leurs chevaux[1] et le poil à leurs bêtes de charge, et poussèrent des cris lugubres dont retentit toute la Béotie : ils venaient de perdre un homme qui, du moins après Mardonius, était le plus estimé et des Perses et du roi. Ce fut ainsi que les Barbares rendirent à leur manière les derniers honneurs à Masistius.

XXV. Les Grecs ayant soutenu le choc de la cavalerie et l’ayant repoussée, cet avantage leur inspira beaucoup plus de confiance. D’abord ils mirent sur un char le corps de Masistius, et le firent passer de rang en rang. Il méritait d’être vu et par sa grandeur et par sa beauté ; et ce fut par cette raison qu’on le porta de tous côtés, et que chacun quitta son rang et courut pour le voir. On fut ensuite d’avis d’aller à Platées, dont le territoire paraissait beaucoup plus commode pour camper que celui d’Érythres par plusieurs raisons, et entre autres à cause de l’abondance de ses eaux. Il fut donc résolu de s’y rendre, et d’y camper en ordre de bataille, près de la fontaine de Gargaphie. Les Grecs, ayant pris leurs armes, marchèrent par le pied du mont Cithéron, passèrent près d’Hysies, et se rendirent

  1. On pourrait soupçonner que cette coutume ne s’observait que parmi les Barbares. On la trouve cependant pratiquée chez les Grecs dès les temps les plus anciens. Lorsque Admète apprend la mort d’Alceste, il ordonne que dans toute la Thessalie on coupa la crinière des chevaux. Le même usage s’observa à la mort de Pélopidas, et Alexandre le Grand le renouvela à celle d’Héphestion ; mais peut-être voulut-il imiter les Perses. (L.)