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URANIE, LIVRE VIII.

sieurs avis qu’on y proposa, celui-ci prévalut. Il fut décidé qu’on resterait ce jour-là à l’endroit où l’on se trouvait, et qu’on en partirait après minuit pour aller au-devant des vaisseaux qui doublaient l’Eubée. Cela fait, comme ils ne virent venir personne contre eux, ils allèrent, vers les trois heures après midi, contre les Barbares, dans l’intention d’éprouver leur habileté dans les combats et dans la manœuvre, en attaquant, en se retirant et en revenant à la charge.

X. Les généraux et les simples soldats de la flotte de Xerxès, voyant les Grecs venir à eux avec un si petit nombre de vaisseaux, les regardèrent comme des insensés. Ils levèrent aussi l’ancre, dans l’espérance de s’en rendre maîtres sans peine. Ils s’en flattaient avec d’autant plus de vraisemblance, qu’ils avaient l’avantage du côté du nombre, et que leurs vaisseaux étaient meilleurs voiliers que ceux des Grecs. Cette supériorité les détermina à les envelopper de toutes parts. Ceux d’entre les Ioniens qui étaient bien intentionnés pour les Grecs servaient à regret, et les voyaient investis avec d’autant plus de chagrin qu’ils étaient persuadés qu’il n’en échapperait pas un seul, tant ils leur paraissaient faibles. Ceux, au contraire, qui étaient charmés de leur situation, s’empressaient à l’envi l’un de l’autre à qui prendrait le premier quelque vaisseau athénien, dans l’espérance d’en être récompensé du roi : car, dans l’armée des Barbares, on faisait plus de cas des Athéniens que de tous les autres alliés.

XI. Au premier signal, les Grecs rangèrent d’abord les proues de leurs vaisseaux en face des Barbares, et rassemblèrent les poupes au milieu, les unes contre les autres. Au second, ils les attaquèrent de front, quoique dans un espace étroit, et prirent trente vaisseaux aux Barbares, dont l’un était monté par Philaon, fils de Chersis, et frère de Gorgus, roi des Salaminiens, un des capitaines les plus estimés de cette flotte. Lycomèdes d’Athènes, fils d’Æschréas, enleva le premier un vaisseau aux ennemis : aussi eut-il le prix de la valeur. La victoire ne se déclara pour aucun des deux partis ; les avantages furent également compensés, et la nuit sépara les combattants. Les Grecs

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