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HISTOIRE D’HÉRODOTE.

Quant à la Chersonèse, les Phéniciens en subjuguèrent toutes les villes, excepté Cardia.

XXXIV. Miltiade, fils de Cimon et petit-fils de Stésagoras, était alors tyran de ces villes ; il les tenait de Miltiade, fils de Cypsélus, qui en avait acquis précédemment la souveraineté de la manière que je vais le raconter. Les Dolonces, peuple de Thrace, étaient en possession de cette Chersonèse. Vexés par les Apsinthiens, avec qui ils étaient en guerre, ils envoyèrent leurs rois à Delphes pour consulter l’oracle. La Pythie leur répondit d’engager à mener une colonie dans leur pays le premier homme qui, au sortir du temple, les inviterait à loger dans sa maison. Les Dolonces s’en retournèrent par la voie Sacrée, traversèrent la Phocide et la Béotie[1] ; et comme personne ne leur offrait l’hospitalité, ils tournèrent du côté d’Athènes.

XXXV. Pisistrate jouissait alors à Athènes de la souveraine puissance. Miltiade y avait aussi quelque autorité. Il était d’une maison où l’on entretenait quatre chevaux pour les jeux olympiques[2] ; sa naissance était illustre. Il remontait à Æacus[3] et à Ægine ; mais, dans les temps plus récents, cette famille s’était naturalisée à Athènes depuis Philée, fils d’Ajax, le premier de cette famille qui soit devenu citoyen de cette ville. Miltiade, étant un jour assis devant sa porte, vit passer les Dolonces. Il reconnut, à leur habit et à leurs piques, qu’ils étaient étrangers. Il les appela, et, lorsqu’ils se furent approchés, il leur offrit sa maison, et les présents qu’on a coutume de faire à des hôtes. Les Dolonces ayant accepté ses offres, et se voyant bien traités, lui découvrirent l’oracle, et le prièrent d’o-

  1. Il y avait un chemin sacré très-célèbre, qui conduisait d’Athènes à Éleusis ; ce ne pouvait être celui-là. Mais c’était peut-être celui par où les Athéniens accompagnaient à Delphes la pompe sacrée. (Wesseling.)
  2. C’est-à-dire qu’il était fort riche. L’Attique étant un pays stérile et peu propre aux pâturages, l’entretien des chevaux y était très-coûteux, et il fallait être riche pour en avoir. (L.)
  3. « Océanus et Téthys eurent un fils nommé Asopus ; celui-ci eut une fille appelée Ægine, qui fut enlevée de Phliunte par Jupiter ; et transportée dans l’île d’Ægine, où elle lui donna un fils nommé Æacus, qui fut roi de cette île. Æacus eut deux fils, Pélée et Télamon. Pélée alla à Phtie en Tessalie. Il y fut roi, et eut Achille. Télamon se retira en Salamine. » (Diodore de Sicile, liv. iv.)