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POLYMNIE, LIVRE VII.

Camicos[1], qui de mon temps était habitée par des Agrigentins ; enfin que ne pouvant ni la prendre ni en continuer le siége, à cause de la famine dont ils étaient tourmentés, ils le levèrent ; qu’ayant été surpris d’une tempête furieuse près de l’Iapygie, ils furent poussés sur la côte avec violence ; que leurs vaisseaux s’étant brisés, et n’ayant plus de ressources pour se transporter en Crète, ils restèrent dans le pays et y bâtirent la ville d’Hyria ; qu’ils changèrent ensuite leur nom de Crétois en celui d’Iapyges-Messapiens[2], et que d’insulaires qu’ils avaient été jusqu’alors ils devinrent habitants de terre ferme ; que cette ville envoya dans la suite des colonies ; que longtemps après, les Tarentins, cherchant à les détruire, reçurent un furieux échec ; de sorte que le carnage des Tarentins et de ceux de Rhégium fut très-considérable, et c’est le plus grand que les Grecs aient jamais essuyé et dont nous ayons connaissance. Ceux de Rhégium, forcés par Micythus, fils de Choiros, à marcher au secours des Tarentins, avaient perdu en cette occasion trois mille hommes ; mais on n’a point su quelle avait été la perte des Tarentins. Quant à Micythus, il était serviteur d’Anaxilas, et avait été laissé à Rhégium pour prendre soin de ses affaires. Ayant été obligé d’abandonner cette ville, il alla s’établir à Tégée en Arcadie, et consacra un grand nombre de statues dans Olympie.

CLXXI. Ce que je viens de dire des habitants de Rhégium et de Tarente doit être considéré comme une digression. L’île de Crète étant déserte, les Præsiens disent qu’entre autres peuples qui vinrent s’y établir, il y eut beaucoup de Grecs ; que la guerre de Troie arriva dans la troisième génération après la mort de Minos, et que les Crétois ne furent pas des moins empressés à donner du secours à Ménélas. Ils ajoutent qu’à leur retour de Troie ils furent, pour cette raison-là même, attaqués de la peste

  1. Cette ville tirait son nom du fleuve Camicos, dont le cours était si rapide, que son eau ne se mêlait pas avec la mer, si l’on en croit du moins Lycus de Rhége.
  2. Ces Crétois s’établirent en Italie, sous le nom d’Iapyges-Messapiens, en la troisième génération avant la guerre de Troie, comme le dit Hérodote dans le paragraphe suivant, c’est-à-dire un peu moins de cent ans avant cette guerre. (L.)