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CLIO, LIVRE I.

mangeait au lieu de jouer. Ils menèrent cette vie pendant dix-huit ans ; mais enfin, le mal, au lieu de diminuer, prenant de nouvelles forces, le roi partagea tous les Lydiens en deux classes, et les fit tirer au sort, l’une pour rester, l’autre pour quitter le pays. Celle que le sort destinait à rester eut pour chef le roi même, et son fils Tyrrhénus se mit à la tête des émigrants.

Les Lydiens que le sort bannissait de leur patrie allèrent d’abord à Smyrne, où ils construisirent des vaisseaux, les chargèrent de tous les meubles et instruments utiles, et s’embarquèrent pour aller chercher des vivres et d’autres terres. Après avoir côtoyé différents pays, ils abordèrent en Ombrie, où ils se bâtirent des villes, qu’ils habitent encore à présent ; mais ils quittèrent le nom de Lydiens, et prirent celui de Tyrrhéniens, de Tyrrhénus, fils de leur roi, qui était le chef de la colonie.

XCV. On a vu les Lydiens subjugués par les Perses ; mais quel était ce Cyrus qui détruisit l’empire de Crésus ? Comment les Perses obtinrent-ils la souveraineté de l’Asie ? Ce sont des détails qu’exige l’intelligence de cette histoire. Je prendrai pour modèles quelques Perses qui ont moins cherché à relever les actions de Cyrus qu’à écrire la vérité, quoique je n’ignore point qu’il y ait sur ce prince trois autres sentiments.

Il y avait cinq cent vingt ans que les Assyriens étaient les maîtres de la haute Asie, lorsque les Mèdes commencèrent les premiers à se révolter. En combattant pour la liberté contre les Assyriens, les Mèdes s’aguerrirent, et parvinrent à secouer le joug et à se rendre indépendants. Les autres nations les imitèrent.

XCVI. Tous les peuples de ce continent se gouvernèrent d’abord par leurs propres lois ; mais voici comment ils retombèrent sous la tyrannie. Il y avait chez les Mèdes un sage, nommé Déjocès ; il était fils de Phraortes. Ce Déjocès, épris de la royauté, s’y prit ainsi pour y parvenir. Les Mèdes vivaient dispersés en bourgades. Déjocès, considéré depuis longtemps dans la sienne, y rendait la justice avec d’autant plus de zèle et d’application que dans toute la Médie les lois étaient méprisées, et qu’il savait que ceux

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