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HISTOIRE D’HÉRODOTE.

vivent de blé, ont des jardins, et ne ressemblent aux Budins ni par l’air du visage ni par la couleur. Les Grecs les confondent, et comprennent les Budins sous le nom de Gélons ; mais ils se trompent.

Leur pays entier est couvert d’arbres de toute espèce ; et, dans le canton où il y en a le plus, on trouve un lac grand et spacieux, et un marais bordé de roseaux. On prend dans ce lac des loutres, des castors, et d’autres animaux qui ont le museau carré. Leurs peaux servent à faire des bordures aux habits, et leurs testicules sont excellents pour les maux de mère.

CX. Quant aux Sauromates, voici ce qu’on en dit. Lorsque les Grecs eurent combattu contre les Amazones[1], que les Scythes appellent Aiorpata, nom que les Grecs rendent en leur langue par celui d’Androctones (qui tuent des hommes), car aior, en scythe, signifie un homme, et pata veut dire tuer ; quand ils eurent, dis-je, combattu contre elles, et qu’ils eurent remporté la victoire sur les bords du Thermodon, on raconte qu’ils emmenèrent avec eux, dans trois vaisseaux, toutes celles qu’ils avaient pu faire prisonnières. Lorsqu’on fut en pleine mer, elles attaquèrent leurs vainqueurs et les taillèrent en pièces. Mais, comme elles n’entendaient rien à la manœuvre des vaisseaux et qu’elles ne savaient pas faire usage du gouvernail, des voiles et des rames, après qu’elles eurent tué les hommes, elles se laissèrent aller au gré des flots et des vents, et abordèrent à Cremnes, sur le Palus-Mæotis. Cremnes est du pays des Scythes libres. Les Amazones, étant descendues de leurs vaisseaux en cet endroit, avancèrent par le milieu des terres habitées ; et, s’étant emparées du premier haras qu’elles rencontrèrent sur leur route, elles montèrent à cheval, et pillèrent les terres des Scythes.

  1. Cette nation a véritablement existé ; mais, sa manière d’exister étant très-précaire, elle a bientôt été éteinte. « Un grand nombre d’écrivains célèbres attestent qu’Hercule fit une expédition contre les Amazones, et qu’il enleva à Hippolyte, leur reine, son baudrier, qu’il emporta en Grèce ; et que les Athéniens, sous la conduite de Thésée, vainquirent ces femmes, qui avaient fait une invasion en Europe, et qu’ils repoussèrent. Cette histoire a été écrite par Cimon avec le même soin que l’on a écrit les batailles des Athéniens contre les Perses. » (Arrian., Exped. Alexand., lib. vii)