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MELPOMÈNE, LIVRE IV.

Il paraît que ces peuples sont des enchanteurs. En effet, s’il faut en croire les Scythes et les Grecs établis en Scythie, chaque Neure se change une fois par an en loup pour quelques jours, et reprend ensuite sa première forme. Les Scythes ont beau dire, ils ne me feront pas croire de pareils contes ; ce n’est pas qu’ils ne les soutiennent, et même avec serment[1].

CVI. Il n’est point d’hommes qui aient des mœurs plus sauvages que les Androphages (anthropophages). Ils ne connaissent ni les lois ni la justice ; ils sont nomades. Leurs habits ressemblent à ceux des Scythes ; mais ils ont une langue particulière. De tous les peuples dont je viens de parler, ce sont les seuls qui mangent de la chair humaine.

CVII. Les Mélanchlænes portent tous des habits noirs ; de la vient leur nom. Ils suivent les coutumes et les usages des Scythes.

CVIII. Les Budins forment une grande et nombreuse nation. Ils se peignent le corps entier en bleu et en rouge. Il y a dans leur pays une ville entièrement bâtie en bois ; elle s’appelle Gélonus. Ses murailles sont aussi toutes de bois ; elles sont hautes, et ont à chaque face trente stades de longueur. Leurs maisons et leurs temples sont aussi de bois. Il y a en effet dans ce pays des temples consacrés aux dieux des Grecs. Ils sont bâtis à la façon des Grecs, et ornés de statues, d’autels et de chapelles de bois. De trois en trois ans, ils célèbrent des fêtes en l’honneur de Bacchus. Aussi les Gélons sont-ils Grecs d’origine. Ayant été chassés des villes de commerce[2], ils s’établirent dans le pays des Budins. Leur langue est un mélange de grec et de scythe.

CIX. Les Budins n’ont ni la même langue ni la même manière de vivre que les Gélons. Ils sont autochthones, nomades, et les seuls de cette contrée qui mangent de la vermine. Les Gélons, au contraire, cultivent la terre,

  1. Les Neures sont des Scythes qui, dans les grands froids, se couvraient d’une saie faite de peaux de loups, et qui quittaient cette fourrure dès que le temps était adouci : voilà tout le mystère, qu’Hérodote n’a pas compris. (Pelloutier, Histoire des Celtes, t. i, p. 305.)
  2. Ce sont les villes sur le Pont-Euxin, et la ville de Borysthène.

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