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MELPOMÈNE, LIVRE IV.

rents le mettent sur un chariot, et le conduisent de maison en maison chez leurs amis : ces amis le reçoivent, et préparent chacun un festin à ceux qui accompagnent le corps, et font pareillement servir au mort de tous les mets qu’ils présentent aux autres. On transporte ainsi, de côté et d’autre, les corps des particuliers pendant quarante jours ; ensuite on les enterre. Lorsque les Scythes ont donné la sépulture à un mort, ils se purifient de la manière suivante. Après s’être frotté la tête avec quelque chose de détersif, et se l’être lavée, ils observent à l’égard du reste du corps ce que je vais dire. Ils inclinent trois perches l’une vers l’autre, et sur ces perches ils étendent des étoffes de laine foulée, qu’ils bandent et ferment le plus qu’ils peuvent. Ils placent ensuite au milieu de ces perches et de ces étoffes un vase dans lequel ils mettent des pierres rougies au feu.

LXXIV. Il croît en Scythie du chanvre ; il ressemble fort au lin, excepté qu’il est plus gros et plus grand. Il lui est en cela de beaucoup supérieur. Cette plante vient d’elle-même et de graine. Les Thraces s’en font des vêtements qui ressemblent tellement à ceux de lin, qu’il faut être connaisseur pour les distinguer, et quelqu’un qui n’en aurait jamais vu de chanvre les prendrait pour des étoffes de lin.

LXXV. Les Scythes prennent de la graine de chanvre, et, s’étant glissés sous ces tentes de laine foulée, ils mettent de cette graine sur des pierres rougies au feu. Lorsqu’elle commence à brûler, elle répand une si grande vapeur, qu’il n’y a point en Grèce d’étuve qui ait plus de force. Les Scythes, étourdis par cette vapeur, jettent des cris confus. Elle leur tient lieu de bain ; car jamais ils ne se baignent. Quant à leurs femmes, elles broient sur une pierre raboteuse du bois de cyprès, de cèdre, et de l’arbre qui porte l’encens ; et, lorsque le tout est bien broyé, elles y mêlent un peu d’eau, et en font une pâte dont elles se frottent tout le corps et le visage. Cette pâte leur donne une odeur agréable ; et le lendemain, quand elles l’ont enlevée, elles sont propres, et leur beauté en a plus d’éclat.

LXXVI. Les Scythes ont un prodigieux éloignement