Page:Hérodote - Histoire, trad. Larcher, tome 1, 1850.djvu/263

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
264
HISTOIRE D’HÉRODOTE.

bataille, et furent battus. Il y en eut un grand nombre de coupés dans leur retraite, et qui ne purent rentrer dans la ville. Après cette défaite, les Samiens exigèrent d’eux cent talents[1].

LIX. Les exilés de Samos ayant reçu des Hermionéens, au lieu d’argent, l’île d’Hydrée, qui touche au Péloponnèse, ils la donnèrent en gage aux Trézéniens. De là ils firent voile en Crète, où ils bâtirent la ville de Cydonie, quoiqu’ils n’y fussent pas allés dans ce dessein, mais seulement pour chasser les Zacynthiens de l’île. Ils y fixèrent leur demeure ; et, durant cinq ans, leur prospérité fut si constante, que non-seulement ils bâtirent tous les temples qu’on voit encore aujourd’hui à Cydonie, mais encore le temple de Dictyne. La sixième année, les Éginètes, les ayant vaincus dans un combat naval, les réduisirent en esclavage avec le secours des Crétois. Ils désarmèrent les proues de leurs vaisseaux, en ôtèrent les sangliers qui leur servaient d’ornements, et les offrirent à Égine, dans le temple de Minerve. Les Éginètes se portèrent à cette vengeance par la haine invétérée qu’ils avaient contre les Samiens. Ceux-ci les avaient attaqués les premiers dans le temps qu’Amphicrate régnait à Samos, et leur avaient fait beaucoup de mal ; mais les Éginètes le leur avaient bien rendu.

LX. Je me suis d’autant plus étendu sur les Samiens, qu’ils ont exécuté trois des plus grands ouvrages qu’il y ait dans toute la Grèce.

On voit à Samos une montagne de cent cinquante orgyies[2] de haut. On a percé cette montagne par le pied, et l’on y a pratiqué un chemin qui a deux bouches en ouvertures. Ce chemin a sept stades de longueur sur huit pieds de hauteur et autant de largeur. Le long de ce chemin, on a creusé un canal qui traverse toute cette montagne. Il a vingt coudées de profondeur sur trois pieds de largeur. Il conduit à la ville, par des tuyaux, l’eau d’une grande fontaine. L’architecte qui a entrepris cet ouvrage était de Mégare et s’appelait Eupalinus, fils de Naustrophus. C’est

  1. 540 000 livres.
  2. 141 toises 4 pieds, mesure de France.