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EUTERPE, LIVRE II.

céda. Ce prince fut, après Psammitichus son bisaïeul, le plus heureux des rois ses prédécesseurs. Il régna vingt-cinq ans, pendant lesquels il fit une expédition contre Sidon, et livra au roi de Tyr un combat naval ; mais enfin la fortune devait cesser de le favoriser. Je rapporterai ici en peu de mots à quelle occasion ses malheurs commencèrent, me réservant à en parler plus amplement quand je traiterai des affaires de Libye.

Apriès, ayant envoyé une armée contre les Cyrénéens, reçut un échec considérable. Les Égyptiens lui imputèrent ce malheur, et se révoltèrent contre lui, s’imaginant que, de dessein prémédité, il les avait envoyés à une perte certaine, afin de les faire périr sans ressource, et de régner avec plus d’autorité sur le reste de ses sujets. Les troupes qui étaient revenues du combat, et les amis de ceux qui’y avaient perdu la vie, indignés contre le roi, se soulevèrent ouvertement.

CLXII. Sur cette nouvelle, Apriès envoya Amasis pour les apaiser. Ce seigneur les alla trouver ; mais, tandis qu’il les exhortait à rentrer dans le devoir, un Égyptien qui était derrière lui couvrit la tête d’un casque, en lui disant que c’était pour le mettre en possession de la couronne. Amasis montra dans la suite que cela ne s’était pas fait contre son gré ; car les rebelles ne l’eurent pas plutôt proclamé roi, qu’il se prépara à marcher contre Apriès. Sur cette nouvelle, ce prince dépêcha Patarbémis, l’un des hommes les plus distingués parmi ceux qui lui étaient restés fidèles, avec ordre de lui amener Amasis en vie. Patarbémis, étant arrivé au camp des rebelles, appela Amasis : celui-ci, qui se trouvait par hasard à cheval, levant la cuisse, fit un pet, et ordonna à Patarbémis de porter cela à Apriès ; et comme Patarbémis ne laissait pas de le prier de se rendre auprès du roi qui le mandait, Amasis lui répondit qu’il s’y disposait depuis longtemps, qu’Apriès n’aurait pas sujet de se plaindre de lui, et qu’il irait le trouver incessamment en bonne compagnie. Patarbémis s’apercevant de ses desseins, et par sa réponse et par les préparatifs qu’il lui voyait faire, partit en diligence pour en donner au plus tôt avis au roi. Aussitôt qu’Apriès le vit